Bernoulli, Johann I an Scheuchzer, Johann Jakob (1730.11.04)

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Autor	Bernoulli, Johann I, 1667-1748
Empfänger	Scheuchzer, Johann Jakob, 1672-1733
Ort	Basel
Datum	1730.11.04
Briefwechsel	Bernoulli, Johann I (1667-1748)
Signatur	ZB Zürich. SIGN: Ms. H 321, pp.227-230
Fussnote	Untere Hälfte von p.229/230 mit Teil der Adresse und Siegel ist abgeschnitten

Monsieur et très honoré Ami

Je Vous suis bien obligé des particularités que Vous m'avés communiqués touchant l'affaire des fauxmonoyeurs; Nous avons ici grand besoin d'en étre instruits par le Canal des Amis du dehors, car on a bien soin de nous cacher ici le veritable état de cette affaire, et d'empecher l'eclat que cela pourroit faire dans notre Ville; il ne Vous sera pas difficle d'en deviner la raison, si Vous faites reflexion sur ce qu'une Personne que Vous nommés parmi ceux qui sont gravées, est d'une famille puissante dans la Magistrature, par consequent capable d'etouffer le bruit et d'apaiser l'orage qui ne manqueroit pas d'ecraser tout autre qui seroit sans appui. C'est pourquoi je Vous prie de me mander la suite de toutes les particularités, sur tout de celles qui regardent les accusés de notre ville, dont je suis extremement curieux. J'apprens qu'avant hier Votre Grand Conseil devoit s'assembler pour deliberer sur cette importante affaire, qui interesse si fort le Public et en particulier le commerce qui est si florissant chés Vous, mais dont le credit pourroit souffrir un grand echec auprés les Etrangers, si on ne remedioit efficacement à la corruption des especes, qui sont le nerf du commerce. Il semble qu'on a pris ici de si bonnes mesures pour supprimer les accusations, que ces mesures influent jusqu'à Berne où il paroit qu'on est assés tiede à decouvrir les Complices de Schmid, temoin une lettre que j'ai vuë, ecrite par un des Chefs de la Ville, dans la quelle il dit, "que les faux monnoyeurs detenus aux arrets à Berne, ne sont que des frippons et de la derniere canaille, qui ne meritent pas qu'on ajoute foi à ce qu'ils déposent contre des Gens d'honneur et de probité reconnue". Vous voyés le but de ces paroles decisives; mais il est plaisant de dire qu'il ne faut pas faire d'attention à ce qu'un Scelerat declare à la torture contre ses complices; à quoi donc bon l'examen et la question qu'on donne aux malfaiteurs, si ce n'est pour decouvrir les complices? Les Patrons de ceux que Cartouche par ex. a declarés par la torture, auroient pû dire, que Cartouche étoit un frippon, auquel il ne falloit pas croire s'il declaroit quelque chose contre des Gens d'honneur et de probité; mais avec tout cela je n'ai jamais sçû, que Stickeberger (que Vous nommés Sensal, mais qui n'est que chetif Changeur des especes) etoit un homme d'honneur et de probité reconnue, lui qui fut attrappé déja quelques fois sur des tromperies en fait de la monnoyerie, ayant il y a quelques ans introduit ici un gros baril chargé des petites pieces de Geneve qu'on y nomme deuxquarts, qui ne valent pas le tiers d'un Kreützer et que ce Drole a debité pour des kreützers entiers, trompant ainsi quantité d'honnetes gens qui ne connoissoient pas cette petite monnoye etrangere; cependant il l'a echappé belle, graces peutètre à ses plus grosses pieces d'or ou d'argent qui ont sçû fermer la bouche à la justice; je croi que si cet homme étoit le seul impliqué dans l'affaire d'aujourdhui, il passeroit mal son temps, mais à l'advis des autres accusés, qui osent braver la rigueur de la justice, il echapera encore sous leur ombre. Je ne sçai si les 2 Schnorff ou l'un d'Eux est aussi aux arrets, ces deux Messieurs pourroient bien decouvrir le pot aux Roses.

Les procés intentés contre Saurin et Mari me sont entierement inconnus, je ne sçai pas meme de quoi il s'agit; Est ce Saurin qui a été Ministre à la Haye, grand Predicateur dont on dit qu'il savoit toucher les coeurs et s'attirer un applaudissement universel? Quant au cydevant Diacre Leonhardin, on dit qu'il est à Rensbourg à quelques lieuës de Leyde caché dans un Cloitre ou Couvent, etabli autrefois par Mad.^e Bouvignon et où s'etoit retiré Poiret et d'autres fanatiques de sa trempe; ce seroit assurement un beau melange de voir un athée parmi des bigots: l'atheisme et la bigoterie étant deux vices tout à fait opposés.

Le changement subit du chaud au froid, dont Vous parlés, fut aussi ici senti avec toutes les circonstances de neige et de vent. C'est sans doute à cette bizarrerie du temps que je dois attribuer mon accés de goute qui m'a pris et repris par intervalles; dont je ne suis pas encore tout à fait quitte; On veut avoir vû ici de meme que chés Vous, plusieurs aurores boreales; il y a des gens qui disent, qu'ils en observerent une avanthier au soir entre 9 et 10 heures. Mais je n'ai rien vû de tout cela.

Je n'ai plus rien à ajouter si non que je suis de coeur et de bouche Monsieur Votre tres humb. et tr. ob. ser.^r J. Bernoulli

Bale ce 4. 9bre 1730.

A Monsieur

[Monsieur J. J. Scheu]chzer

[...] Professeur

[...]

[à]

Züric

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Fussnoten

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