Bernoulli, Johann I an Scheuchzer, Johann Jakob (1730.05.16)

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Autor Bernoulli, Johann I, 1667-1748
Empfänger Scheuchzer, Johann Jakob, 1672-1733
Ort Basel
Datum 1730.05.16
Briefwechsel Bernoulli, Johann I (1667-1748)
Signatur ZB Zürich. SIGN: Ms. H 321, pp.209-212
Fussnote Auf p.211 P.S.



File icon.gif Monsieur et tres honoré Ami

Le jour critique du Leonhardin est enfin venu et avec cela le denouement de toute la comedie ou plutot tragedie: Aprés que jeudi passé il se tint conseil des treise, où furent invités aussi Mrs. les Theologiens pour apprendre d'Eux leur sentiment, touchant le chatiment qu'on devroit infliger au miserable Diacre; Ils ne repondirent autre chose, à ce qu'on m'a dit, si non qu'un tel Homme ne pouroit étre plus toleré dans le service de l'Eglise, mais pour ce qui est du chatiment qu'il aura merité outre la privation de sa charge, ils ne vouloient rien prescrire là dessus au Magistrat, puisque cela étoit purement de la dependance du droit Civil, quoiqu'à mon avis les Theologiens n'eussent pas mal fait de recommender à Mrs. du Conseil de lire le chapitre 13.e du Deuteronome, où ils auroient appris quelle peine Dieu a ordonnée d'infliger aux faux Prophetes et Seducteurs du Peuple, qui alloit jusqu'au supplice de mort le plus severe, et meme à l'extirpation non seulement de leurs familles mais aussi de toute la Ville où ces malheureux ont fait des adherants et sectaires. Quoiqu'il en soit, samedi suivant le 13 de ce mois le rapport des Treize ayant été fait devant le Conseil, on proceda à la sentence finale, qui aprés grand debat tourna enfin à la degradation du Diacre, à la pluralité de 23 voix contre 17 qui vouloient une simple suspension: Ainsi Vous voyés qu'on a eu bien de la peine pour faire triompher la cause de Dieu; mais il ne faut pas s'en étonner, car le Pere du diacre, plus adroit que le plus rusé Jesuite, remua Ciel et terre, sur tout les deux derniers jours, pour traverser la sentence qu'il prevoyoit; il se presenta pour cela lui meme avec deux de ses beaufreres devant le Conseil, pour plaider la mechante cause de son fils, dans l'unique intention, de faire sortir de la Session quelques Membres du Conseil qui sont de leur parentage mais tres honnetes Gens, qu'il connoissoit File icon.gif n'etre point favorables à son fils denaturé; si ce tour de baton ou plutot ce dernier effort avoit reussi, il auroit eu la pluralité des voix de son coté, mais il fut decreté sur le champ, que la proposition du Pere ne devant pas étre confondue avec l'affaire de son fils, ces Messieurs demeureroient dans la Seance et auroient leurs voix libres comme les autres; Ainsi le Jesuite fut renvoyé avec un pied de nés rempli de rage et de desespoir. On a déja donné ordre de proceder incessamment à l'election d'un nouveau Diacre aprés la promulgation de la vacance qu'on a la coutume de faire aux Ministres de la Campagne, pour savoir s'il y en a qui y aspirent, ce qui demande le terme environ de 8 jours. Vous croyés que le petit tremblement de Terre que nous avons senti dernierement auroit fait quelque effet sur les Esprits portés pour W. par quelque interest ou penchant secret, et que se petit signe de la colere de Dieu les auroit ramené à leur devoir; mais Vous ne connoissés gueres le naturel de ces Gens: Ils verroient avec un sang froid la terre s'ouvrir par un tremblement pareil à celui de Palermo d'il y a quelques ans, prete à les engloutir, sans pourtant en étre ébranlés; Ils regarderoient cela, comme de simples effets des causes naturelles, et ils ne seroient pas moins portés à executer leurs plus noirs desseins.

J'ai recû de Dieu avec la meme egalité d'ame le gain qui m'est tombé en partage de la part de l'Acad. Roy. de Paris, que j'avois fait au paravant de la perte que m'a causée une banqueroute; la joye de l'un aussi bien que le chagrin de l'autre, a été tres modique. Je Vous suis pourtant bien obligé de la part que Vous prenés à tout ce qui me regarde.

Par les raisons que Vous me dites je comprends fort bien, qu'il ne me seroit pas convenable de placer quelque argent à Zuric; ainsi je verrai autrement ce que j'aurai à faire. Cependant je Vous rends graces et aussi à Mr. Votre Frere, pour le quel je conserve toujours la meme estime et que je salue tres cordialement, de ce que Vous avés pris le soin de Vous en informer. J'ai l'honneur d'étre avec un attachement inviolable Monsieur Votre tr. humb. et tr. obeissant ser.teur J. Bernoulli

Bale ce 16. Maj 1730.

File icon.gif P. S. Etant sur le point de plier cette lettre, on vient de me rapporter, que mon Banqueroutier Heusler (qui étoit revenu ici sur le sauve conduit qu'on lui avoit accordé) s'est precipité cette nuit par la fenetre de desespoir sans se faire d'autre mal, que celui de se casser les deux jambes. Voilà le sort de ces malheueux! Le bruit se repand dans ce moment, que le Banqueroutier Heusler est mort de sa chûte; il s'est jetté non pas de la fenêtre mais d'une gallerie sur le pavé de la basse Cour.


Fussnoten

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