Bernoulli, Johann I an Montmort, Pierre Rémond de (1719.06.15)
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Autor | Bernoulli, Johann I, 1667-1748 |
Empfänger | Montmort, Pierre Rémond de, 1678-1719 |
Ort | Basel |
Datum | 1719.06.15 |
Briefwechsel | Bernoulli, Johann I (1667-1748) |
Signatur | Basel UB, Handschriften. SIGN: L Ia 665, Nr.14 |
Fussnote | Randstriche und Unterstreichungen |
Ma derniere etoit du 26. Janvier,[1] à la quelle je n'ai point reçû de reponse: Dans la lettre que Vous avés fait l'honneur à mon fils[2] de lui ecrire du 15. Mai[3] Vous dites, que Vous m'en avés ecrit une il y a environ deux mois, mais qui doit s'etre perdu puisque je n'en ai point reçû depuis celle où Vous m'aviés annoncé le probleme de Mr. Taylor[4];[5] j'en suis je Vous proteste extremement faché, car si jamais j'ai desiré avec impatience une reponse, ç'a eté justement dans cette occasion pour sçavoir à quoi se determineroit Mr. Taylor[6] sur la proposition que je Vous avois prié de lui faire de ma part touchant la gageure entre lui et moi par rapport à son probleme. Cette gageure n'aiant pas eu de suite faute de reponse de Mr. Taylor[7], j'ai envoié à Leipzic ma solution de son probleme avec celle du probleme de Mr. Keil[8]: j'ai envoié ces deux pieces à Mr. Varignon[9] le priant de Vous les communiquer aussi, ce qu'il a fait suivant une lettre que j'ai reçû de lui.[10] Vous trouverés peutetre que ma solution du probleme de Mr. Taylor[11] est bien longue, mais Vous remarquerés aussi que ce n'est pas tant la methode que le detail, dans le quel je me suis etendu de propos deliberé pour expliquer toutes les minuties de peur qu'on ne me fit des chicanes, qu'on puisse accuser de longueur; quoi qu'il en soit, je me flatte au moins, que ma solution quoique longue, Vous aura eté claire et intelligible, car je me fonde sur la louange que Vous m'avés donnée d'avoir le talent de me rendre intelligible; souvenés Vous aussi que j'ai ecrit cette piece pour le public, qui n'entend pas les choses à demi mot, mais qui veut etre instruit tout au long, si je voulois suivre la mode de Mr. Taylor[12], qui Vous a envoié dites Vous, une solution fort abregée mais que Vous n'avés pas entendu, je n'aurois qu'à Vous envoier le lambeau de papier de la largeur d'une main, sur le quel toute mon analyse est projettée, mais quelle utilité en auriés Vous et sur tout le public qui n'aime pas à prendre la peine de dechiffrer? Quant à moi j'aime la clarté et la facilité, ce qui fait que dés que je n'entens pas une chose que je lis avec attention je la passe avec indignation et si c'est une demonstration ou une solution j'aime mieux la chercher par moi meme puisque cela ne me donne pas tant de peine que de m'ennuier à deviner les pensées d'un autre; Je n'ai point de honte de Vous avouer que par cette raison je ne m'applique pas à lire beaucoup, particulierement les Auteurs qui ecrivent à la façon de Mr. Taylor[13]: il y a bien des endroits de cette nature dans les Princip. math. Phil. de Mr. Newton[14], la Phoronom. de Mr. Herman[15] n'en est pas exemte non plus; Il semble qu'en ecrivant comme cela on ne se met pas en peine d'instruire pourvû qu'on brille. J'ai eu bien du plaisir à lire la copie que Vous avés eu la bonté de nous envoier de Votre lettre à Mr. Taylor[16] du 18. Decembre dernier:[17] Il est vrai que Vous y parlés avec Votre sincerité ordinaire; mais c'est cela meme qui Vous fait honneur auprés des Gens de bien, car certainement on se feroit tort d'applaudir les Gens qu'on aime et qu'on veut avoir pour Amis dans ce qu'ils disent de mal comme dans ce qu'ils disent de bien, ce seroit une bassesse qui ne conviendroit qu'à des flateurs vils et abjects. Mais Vous Monsieur qui haissés ce vice comme la peste et qui aimés tant la candeur et la franchise, pourquoi de peur de me faire de la peine avés Vous supprimé dans la copie les 3 lignes (je sçai bon gré au pauvre defunt etc.) et pourquoi les exprimer ensuite dans Votre lettre à mon fils[18]? est ce peutetre parce que Vous Vous etes repanti aprés la copie faite, de n'avoir pas suivi exactement en tout l'original? si cela est je loue Votre delicatesse; ou est ce peut etre parce que Vous avés eu la pensée, que mon fils[19] ne me montreroit pas Votre lettre, en ce cas j'aurois sujet de me plaindre de ce que Vous n'usez pas avec moi de toute Votre sincerité comme avec Mr. Taylor[20], en me cachant ce que par une crainte vaine Vous croyés me pouvoir etre desagreable: j'appelle vaine cette crainte, car loin de me trouver offencé de ce que Vous avés dit touchant la faute et le pretendû paralogisme dans ma premiere analyse des isoperimetres à cause du quel les 50 écus, dites Vous, n'etoient pas bien gagnés, je suis bien aise d'avoir occasion de Vous tirer de Votre prejugé, car il faut que Vous sçachiés, qu'il n'y a point de paralogisme dans la methode et que la faute qui s'est glissé dans l'analyse ne regarde que l'application de ma methode à des exemples qui demandoient une certaine restriction oubliée par megarde; or ces exemples n'etoient point compris dans le probleme que mon frere[21] m'avoit proposé, et que je preten[s] encore avoir resolû legitimement, temoin la conformité reconnue par mon frere[22] de ma solution avec la sienne, tellement que les 50 écus etoient toujours bien gagnés, le surplus d'etendue que j'ai donnée moi meme à son probleme et au quel je n'etois pas astreint, ne faisant rien ni pour ni contre la validité de ma solution de son probleme, non obstant l'erreur qui s'est glissé dans cette extension surerogatoire et volontaire. Pour ce qui est de ma nouvelle solution du probleme des isoperimetres, contenue dans les Actes de Leipzic aux mois de Janvier et de Mars 1718,[23] Vous la loués comme trés belle, c'est de quoi je me felicite; Vous dites qu'elle n'est point differente dans le fond de celle de Mr. Herman[24], Vous avés raison, cependant d'avoir reduit la methode comme j'ai fait à une surprenante facilité et evidence jusqu'à m'en passer entierement de calcu[l,] là où mon frere[25] a eté obligé de s'abimer dans un calcul afreux qui fait peur au plus hardi calculateur, et là où Mssrs. Taylor[26] et Herman[27] n'ont pu se dispenser d'emploier une assés longue analyse, qui ote tout l'agrément à la methode et qui empeche d'en voir d'un coup d'oeil la facilité avec laquelle on peut l'appliquer à une infinité d'autres exemples, tout cela ne merite-t-il pas qu'on fasse quelque difference entre nos solutions, je parle de la mienne et de celle de Mr. Herman[28]. Je pourrois faire encore mention d'autres problemes que j'y ai resolus, et aux quels Mr. Herman[29] ni Personne autre n'ont point touché; par exemple celui de trouver d'entre une infinité de courbes d'une longueur donnée qui joignent deux points donnés celle qu'un mobile parcourt dans le moindre tems; item de toutes les courbes isochrones c'est à dire qui sont parcourues en tems egaux, trouver celle qui fasse la plus grande aire avec la ligne droite qui joint les deux points donnés, etc. Vous avés aussi raison de dire que nos solutions sont entées sur celle de feu mon frere[30], qui la regardoit effectivement comme son chef d'oeuvre, sans doute à cause du calcul terrible qu'il croioit inevitable; mais je trouve que ce n'est qu'en consideration de ce calcul, que ce probleme peut Vous paroitre surpasser en difficultés toutes les productions de ce genre, pour moi je puis me vanter d'avoir plus fait en evitant ces difficultés, que mon frere[31] en les surpassant, car je ne sçai si celui merite beaucoup de louange qui pour arriver à son but marche par des lieux scabreux et remplis de broussailles lorsqu'il pouroit y aller par un sentier frayé et aplani qui seroit meme beaucoup plus court que la mechante route qu'il prend. C'en est assés sur cet article, permettés moi Monsieur que je continue mes reflexions sur le reste de Votre lettre à Mr. Taylor[32]: Vous reprochéz à Mr. Taylor[33], que quand il a donné au public son livre Meth. increm.[34] il etoit peu instruit de l'histoire des nouvelles decouvertes, et que Vous croiriés meme qu'il ne l'est pas assés à present pour un homme destiné comme il est à jouer un grand rolle parmi les sçavants de ce siecle, si j'ose dire ce que je pense je dirai, que Mr. Taylor[35] est peutetre plus instruit que Vous ne croiés de l'histoire des nouvelles decouvertes, et que ce n'est qu'une ignorance affectée de ces faits historiques, pour etre en droit de dissimuler, comme font plusieurs de ces Messrs. les Anglois, les veritables Auteurs des decouvertes dont ils remplissent leurs livres sous leurs propres noms, ou qu'ils attribuent faussement à quelques uns de leurs compatriotes. La plus grande partie du livre de Mr. Taylor[36] n'est qu'un amas de ce qu'il a emprunté de nous sans nous faire l'honneur de nous nommer; sa methode meme des incremens n'est autre chose que le calcul ordinaire des fluxions et des fluentes, s'il le nie je voudrois qu'il donnat quelque exemple qui fût resoluble seulement par sa methode et non pas par la notre. Mon memoire sur le centre d'oscillation inseré dans les Memoires de l'Acad. de 1714 est le meme que celui que j'avois publié dans les Actes de Leipzic avec un peu de changement:[37] Mr. Taylor[38] en a bien profité, puisqu'il lui a fait la grace de l'adopter pour son enfant, tout ce qu'il lui a ajouté c'est le voile de l'obscurité dans lequel il l'a enveloppé pour tacher de le rendre meconnoissable, mais les clairvoiants ne laissent pas de le reconnoitre, Mr. Herman[39] est aussi de mon sentiment. Il est vrai ce que Vous dites, que dans les leçons manuscriptes que j'avois fait etant à Paris pour Mr. le M. de l'Hopital[40] toutes les analyses des courbes Velaria, Catenaria, Lintei etc. se trouvent, à l'exception de celle de la courbe elastique,[41] mais Vous devés sçavoir qu'etant à Ouques chez Mr. de l'Hopital[42] pendant tout l'eté de 1692 aprés l'hyver dans le quel j'avois fait ces leçons, je lui ai encore donné plusieurs autres leçons par ecrit que l'on aura sans doute trouvé parmi les papiers de feu Mr. de l'Hopital[43], je lui ai donné entre autre une analyse toute particuliere de la courbe elastique, bien differente de celle de mon frere[44];[45] comme j'ai toujours eté trop paresseux pour tirer copie de mes propres ecrits je n'en ai point tiré non plus de ces leçons faites à Ouques; je me souviens pourtant qu'un Vallet de chambre de Mr. de l'Hopital[46] nommé Aubin a pris la peine de m'en copier quelques unes, et aussi si je ne me trompe justement celle qui contient l'analyse de l'elastique; si Vous etes curieux je la chercherai parmi mes vieux papiers pour Vous la communiquer. En parlant dans Votre lettre à Mr. Taylor[47] sur la premiere decouverte des Chainettes, Vous le faites d'une maniere comme si mon frere[48] y eut eu autant de part que moi, cependant je Vous ai prouvé dans une de mes lettres[49] et Vous en etiés convaincû que mon frere[50] ne sçachant pas resoudre le probleme des chainettes a eté obligé d'apprendre de moi la premiere methode de resoudre ce probleme. Je trouve dans la copie de Votre lettre[51] le commencement d'un passage par ces mots J'ai eté fort surpris de trouver ce qui suit dans votre lettre T. à M., je serois curieux de sçavoir le sujet de Votre surprise. C'est bien fait de faire justice au merite de Mr. Newton[52] et de le regarder comme un homme au dessus des autres et qu'on ne peut pas trop admirer, aussi me suis-je proposé de lui ecrire aux premiers jours pour lui rendre mes hommages, j'ai prié Mr. Varignon[53] de me dire l'adresse qu'il faudra mettre sur la lettre. Permettés moi Monsieur que je Vous fasse ici sentir ma jalousie et mon mecontentement de ce que Vous faites profession d'etre non seulement ami de Mr. Taylor[54] mais de l'etre plus sans comparaison que des Geometres Allemands que Vous n'avés jamais vûs: Pour ne Vous rien cacher, je me flattois d'etre pour le moins aussi avant dans Votre amitié, que l'est Mr. Taylor[55], dites moi, est-ce ma faute que Vous ne m'ayés pas vû? mais puisque Vous n'aimés que ce que Vous voiés, je puis bien Vous dire que je suis au desespoir de me trouver dans un etat qui ne me permet pas de faire une seconde fois le voiage de France, sans cela je vous assure que rien ne m'empecheroit de le faire, dût-il etre deux fois plus long qu'il n'est, pour etre vû de Vous et pour gagner Votre Amitié. Il y a toute la solidité requise dans le raisonnement que Vous faites à Mr. Taylor[56] pour le convaincre qu'il est insoutenable de dire que Mr. Leibnits[57] et nous deux freres[58] ne sommes pas les vrais et presque uniques promoteurs des calculs en questions, Vous allegués tant d'exemples de nos decouvertes qui sont publics qu'il est impossible de nier une verité qui est appuyée sur des faits comme sur autant de temoignages authentiques: je voudrois donc sçavoir ce que Mr. Taylor[59] y a trouvé à redire, veut il parler[60] contre le jour? je suis charmé de la maniere dont Vous avés plaidé notre cause ou plutot la cause de la verité, je n'aurois pas sçû la mettre dans un si beau jour et mon propre interest ne m'auroit pas fourni tant d'eloquence pour defendre une verité qui ne me doit pas etre indifferente comme elle l'est par rapport à Vous; les Anglois envieux auront beau crier, leur effort ne fera que blanchir contre des monumens si stables qu'ils tachent de renverser, et ils montreront par là à la posterité la honte de leur envie. Vous n'avés pas tort Monsieur de comter pour rien ce que Mr. Carré[61] et quelques autres ont donné sur ces matieres, sur tout Mr. Carré[62] qui n'a fait qu'effleurer legerement les premiers principes du calcul integral qu'il venoit d'apprendre de Mr. Varignon[63] dont il etoit l'Eleve, et cela d'une maniere si imparfaite que les paralogismes que j'ai remarqué dans son livre,[64] marquent assés qu'il n'entendoit que fort superficiellement la matiere qu'il s'est hazardé de traiter. Je ne sçaurois passer sous silence un beau trait de Votre sincerité que j'ai trouvé dans la lettre à Mr. Taylor[65] et qui est digne d'admiration, c'est que Vous avoués ingenument que nous avons Mr. Leibnits[66] et moi revelé de bonne heure à Mr. le M. de l'Hopital[67] nos secrets, qui apparemment ajoutés Vous, en seroient encore pour tous les Geometres d'aujourd'hui, si nous avions voulu les cacher à l'imitation de Mr. Newton[68]; que sçait on ce qui seroit arrivé si j'avois voulu suivre l'humeur bizarre de mon frere[69], qui au commencement etoit pour le moins aussi mysterieux que Mr. Newton[70]; je pourrois Vous montrer quelques unes de ses lettres qu'il m'a ecrit lorsque j'etois à Paris, dans lesquelles il m'a grondé souvent de ce que j'etois si facile à communiquer nos secrets, et m'exhortoit à les tenir cachés;[71] sans doute si j'avois suivi son conseil, nous n'aurions pas excité l'emulation et l'envie de quelques Anglois, qui dormiroient peut etre encore, et ne se seroient jamais avisé d'etudier aujourd'hui comme ils font avec tant d'ardeur ces nouvelles methodes, seulement par un effet d'envie, comme Vous dites fort bien parce que nous les avons decouverts et publiés les premiers: Vous croiés, Monsieur, voir Mr. Taylor[72] tout pret à parler le meme langage que ces Anglois envieux, je le crois aussi, il en a donné un bel echantillon dans la preface de sa solution du probleme des trajectoires proposé par Mr. Leibnits[73]:[74] car avec quelle hauteur et aigreur ne parle-t-il pas de nous qu'il nomme Imitatores Leibnitii[75]? c'est dommage qu'il gate ses belles qualités par ces sortes de bassesses qu'il devroit laisser à Mr. Keil[76] et à d'autres qui n'ont point de merite et qui ne trouvant rien de solide s'abandonnent aux injures contre ceux dont la vertu et la bonne reputation leur fait de la peine. Voila Monsieur mes reflexions sur Votre lettre à Mr. Taylor[77], je reviens à celle que Vous avés ecrite à mon fils[78]: On est naturellement porté à aimer les choses faciles, c'est avec raison que Vous les aimés aussi, mais c'est par un excés de modestie que Vous ajoutés que ce sont les seules dont Vous soiés capable, quiconque aura lû Votre admirable Essai d'analyse et ce que Vous avés ecrit sur la sommation des suites[79] condamnera Votre modestie et Vous jugera capable non d'entendre des choses faciles mais de decouvrir ce qu'il y a de plus sublime dans les mathematiques; c'est pour quoi le public ne Vous pardonnera pas Votre dessein de Vous divertir desormais et de ne plus vouloir travailler; Vous etes encore jeune et plein de vigueur, et Vous n'etes pas obligé comme moi à partager Votre tems pour en donner la plus grande partie à des occupations onereuses et desagreables que m'impose la charge de Professeur, sans parler des affaires domestiques dont on est accablé quand on a une famille nombreuse. Mr. Taylor[80] doit etre d'une sensibilité extraordinaire s'il se sent piqué si fort de ce que je dis de lui dans ce que j'ai donné l'année passée sur les isoperimetres; je n'y ai dit autre chose si non que la solution qu'il a donnée de ce probleme est obscure, qu'il semble qu'il affecte l'obscurité dans ses ecrits, que cette obscurité que l'on trouve dans cette solution est aussi desagreable au lecteur que la prolixité de celle de mon frere[81], et enfin qu'il paroit que Mr. Taylor[82] a suivi la methode de mon frere[83] qu'il a taché seulement d'abreger, voila tout ce que j'ai dit sur son chapitre, jugez si je n'ai pas dit la pure verité, Vous lui repondrés pour moi et je m'en tiendrai à Votre reponse; mais de mon coté n'ai je pas de quoi me sentir piqué avec plus de raison des expressions choquantes dont il se sert dans sa solution du probleme des trajectoires? ces Messieurs sont d'etranges Gens, ils croient qu'il leur est permis de tout dire de nous et ne sçauroient souffrir que nous leur decouvrions leur foible. Est ce publiquement dans les Journaux de Leipsic ou ailleurs que Mr. Herman[84] invite les Geometres à la solution de ses deux problemes?[85] je les trouve assés curieux, pour ce qui est du premier qui est de trouver la courbe dont l'aire c'est à dire , je l'ai resolû et mon fils[86] en a aussy trouvé une solution conforme à la mienne; il est vrai ce que Mr. Herman[87] dit que l'on peut trouver une equation de la courbe en termes finis, mais il n'est pas vrai ce qu'il ajoute que cette courbe sera toujours geometrique pourvû que et soient des exposants rationels, car nous trouvons qu'afin que la courbe soit geometrique c'est à dire algebraique, non seulement et mais aussi le coefficient doit etre rationel; la solution de ce probleme est plus longue que difficile. Quant à l'autre probleme de trouver des courbes algebraiques dont la rectification indefinie depend de la quadrature du cercle ou de l'hyperbole ou de telle autre courbe qu'on voudra, et qui aient non obstant cela un ou deux etc. arcs differents absolument rectifiables independamment de la quadrature de la courbe de la quelle leur rectification indefinie depend; si je me souviens bien il m'a aussi proposé autre fois ce probleme, mais comme il ne m'a pas dit qu'il en ait trouvé la solution je n'y ai pas fait d'attention le considerant comme un probleme insoluble par qui que ce soit, aussi Mr. Herman[88] ne fait il pas paroitre comme dans le premier qu'il l'ait resolu à present puisqu'il se contente de le proposer; Or il n'y a point d'artifice de proposer des problemes insolubles je pourois lui proposer par ex. la quadrature ou la rectification du cercle ou de telle autre courbe qu'on voudra, aurois je fait grand' chose si je ne l'ai pas resolu moi meme: Ce probleme de Mr. Herman[89] suppose qu'on sçache reduire la quadrature de toute courbe donnée à la rectification d'une courbe algebrique, cependant c'est ce probleme que j'ai toujours cherché à resoudre comme aiant un grand usage dans la construction des courbes qui demandent des quadratures, parce que dans la pratique les longueurs des courbes sont plus aisées à prendre que leurs aires, mais j'avoue franchement que je n'en suis pas encore venû à bout. Si Mr. Herman[90] possede une methode generale pour reduire les quadratures aux rectifications des courbes algebriques, j'aurai du plaisir à l'aprendre de lui: En attendant je lui propose cet autre probleme que j'ai resolu et qui a beaucoup de rapport avec le sien, le voici: Trouver une infinité de courbes algebriques dont la rectification indefinie depende de la rectification de telle autre courbe algebraique qu'on voudra et qui aient chacune non obstant cela une infinité d'arcs absolument rectifiables independamment de la rectification de la courbe de la quelle leur rectification indefinie depend. Ce probleme semble d'abord plus difficile que celui de Mr. Herman[91], cependant il ne l'est pas car je Vous dis que je l'ai resolu.
Nous avons enfin reçû Vos paquets il y a quelques semaines, j'ai fait tenir incontinent à Mr. Herman le Pere[92] 4 exemplaires de Vos suites et lui aussi m'a envoié ce qu'il y avoit dans son paquet pour moi et pour mon Neveu[93], et j'ai donné le tout que vous avés destiné pour ce dernier à son Frere[94], qui trouva peu aprés occasion de le lui envoier en Italie. Pour votre critique de la philosophie des Anglois que Vous aviés promis, si je ne me trompe de nous envoier aussi, elle ne se trouva pas dans ces deux paquets. Je repete mes actions de grace pour tout ce que Vous avés eu la bonté de m'envoier, je trouve Vos decouvertes sur les suites tres excellentes, j'y reconnois le style de Mr. Taylor[95], qui apparemment a traduit Votre François en Latin, mais entre nous dit, ce n'est pas de la plus belle latinité y aiant meme des soloecismes. À ce que je vois ce n'est que la premiere partie de Votre Traité, est ce que la seconde ne paroitra pas aussi? Mr. Leibnits[96] et moi nous nous exerçames autrefois longtems sur les suites, je trouve dans une de mes lettres que je lui ai ecrite il y a 25 ans entre autres un theoreme qui me paroit assés beau, mais dont j'ai oublié la demonstration,[97] comme je n'ai pas la matiere presente à l'esprit, je ne veux pas la chercher, Vous qui y etes versé plus que personne, Vous la trouverés aisement, voici donc le theoreme , j'entens par tel nombre affirmatif qu'on voudra entier ou rompu, ou meme un nombre negatif mais moins grand que l'unité.
Dans ce moment j'en retrouve la demonstration, elle est fort facile et à peine digne de Votre application, voici meme le theoreme plus general , est un nombre quelconque affirmatif. Vous voiés que etant un nombre entier le nombre des termes devient fini.
Vous me rendés justice en me croiant en droit de me reposer et dispensé de repondre aux defis de qui que ce soit, mais ce n'est pas que je sois degouté des sciences et des sçavans, je le suis seulement des persecutions de mes adversaires qui me chagrinent et qui me derobent mon tems et mon repos quand on m'oblige de leur repondre; le commerce litteraire avec des gens de bien me sera toujours agreable, ainsi loin que Vos lettres me fassent de la peine, au contraire je puis Vous assurer que toutes les fois que j'en reçois je me rejouis extremement, parce que j'en apprens toujours quelque chose que je ne sçavois pas: Il est vrai que souvent je laisse passer bien du tems avant que de Vous repondre, mais je Vous supplie Monsieur de ne le pas prendre en mauvaise part, ni de croire que ce soit manque d'estime pour Vous; l'etat de mes affaires et je ne sçai quelle repugnance que je me sens quelquefois contre le travail d'ecrire dans une langue etrangere que je ne possede pas bien, est le plus souvent la cause de mon long silence; cependant quand je me mets à ecrire, je repare en quelque façon ma faute par des lettres comme Vous voiés excessivement longues, dont la lecture Vous ennuiera, je le sçai, mais que faire, c'est là encore un de mes defauts, parce que je n'ai pas encore appris l'art d'ecrire beaucoup en peu de paroles, ce qui acheve de me rendre tardif au devoir de repondre. Quoi qu'il en soit quand je ne repondrai pas exactement à toutes Vos lettres mon fils[98] y suppléera de tems en tems, si Vous voulés bien le permettre; il se recommende à Vos bonnes graces. Mr. Varignon[99] Vous a fait tenir comme il m'ecrit les deux paquets que je lui ai adressés pour Vous; Vous y aurés trouvés les livres que j'ai reçûs pour Vous de mon Neveu[100], et auxquels j'ai ajouté une dissertation sur mon phosphore mercurial,[101] cette piece peutetre n'est pas de Votre gout, mais qu'importe? Vous n'avés qu'à la laisser parmi Vos papiers inutils sans prendre la peine de la lire. C'est une chose superflue que Vous faites de me remercier de ce que je Vous ai donné publiquement la qualification qui Vous convient, Vous aurés vû que j'en ai usé de meme dans ma solution du probleme de Mr. Taylor[102]; et je ne manquerai pas d'en user comme cela toutes les fois que j'aurai occasion de parler de Vous. Votre merite veut que je lui rende justice, les epithetes honorables c'est la moindre marque que je puisse Vous en donner. Je souhaite d'etre en etat de Vous en donner de plus eclatantes, et de Vous faire voir avec combien d'estime et de veneration je suis Monsieur Votre tres humble et tres-obeissant serviteur J. Bernoulli
Bâle ce 15. Juin 1719.
Fussnoten
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Bernoulli, Nicolaus II (1695-1726).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Keill, John (1671-1721).
- ↑ Varignon, Pierre (1654-1722).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Newton, Isaac (1643-1727).
- ↑ Hermann, Jacob (1678-1733).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Diese vierseitige Kopie des Briefes von Montmort an Taylor findet sich in UB Basel, MS L I a 665, Nr. 26{*}.
- ↑ Bernoulli, Nicolaus II (1695-1726).
- ↑ Bernoulli, Nicolaus II (1695-1726).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Bernoulli, Jacob I (1655-1705).
- ↑ Bernoulli, Jacob I (1655-1705).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Hermann, Jacob (1678-1733).
- ↑ Bernoulli, Jacob I (1655-1705).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Hermann, Jacob (1678-1733).
- ↑ Hermann, Jacob (1678-1733).
- ↑ Hermann, Jacob (1678-1733).
- ↑ Bernoulli, Jacob I (1655-1705).
- ↑ Bernoulli, Jacob I (1655-1705).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Hermann, Jacob (1678-1733).
- ↑ L’Hôpital, Guillaume François Antoine de (1661-1704).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ L’Hôpital, Guillaume François Antoine de (1661-1704).
- ↑ L’Hôpital, Guillaume François Antoine de (1661-1704).
- ↑ Bernoulli, Jacob I (1655-1705).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ L’Hôpital, Guillaume François Antoine de (1661-1704).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Bernoulli, Jacob I (1655-1705).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Bernoulli, Jacob I (1655-1705).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Newton, Isaac (1643-1727).
- ↑ Varignon, Pierre (1654-1722).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Leibniz, Gottfried Wilhelm (1646-1716).
- ↑ Gemeint sind Jacob I (1655-1705) und Johann I Bernoulli (1667-1748).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Im Manuskript steht "parlé".
- ↑ Carré, Louis (1663-1711).
- ↑ Carré, Louis (1663-1711).
- ↑ Varignon, Pierre (1654-1722).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Leibniz, Gottfried Wilhelm (1646-1716).
- ↑ L’Hôpital, Guillaume François Antoine de (1661-1704).
- ↑ Newton, Isaac (1643-1727).
- ↑ Bernoulli, Jacob I (1655-1705).
- ↑ Newton, Isaac (1643-1727).
- ↑ Diese Briefe von Jacob I (1655-1705) an Johann I Bernoulli (1667-1748) sind nicht erhalten.
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Leibniz, Gottfried Wilhelm (1646-1716).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Leibniz, Gottfried Wilhelm (1646-1716).
- ↑ Keill, John (1671-1721).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Bernoulli, Nicolaus II (1695-1726).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Bernoulli, Jacob I (1655-1705).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Bernoulli, Jacob I (1655-1705).
- ↑ Hermann, Jacob (1678-1733).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Bernoulli, Nicolaus II (1695-1726).
- ↑ Hermann, Jacob (1678-1733).
- ↑ Hermann, Jacob (1678-1733).
- ↑ Hermann, Jacob (1678-1733).
- ↑ Hermann, Jacob (1678-1733).
- ↑ Hermann, Jacob (1678-1733).
- ↑ Hermann, Germanus (1648-1729).
- ↑ Bernoulli, Nicolaus I (1687-1759).
- ↑ Bernoulli, Benedict (1692-1759).
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
- ↑ Leibniz, Gottfried Wilhelm (1646-1716).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Bernoulli, Nicolaus II (1695-1726).
- ↑ Varignon, Pierre (1654-1722).
- ↑ Bernoulli, Nicolaus I (1687-1759).
- ↑ [Text folgt].
- ↑ Taylor, Brook (1685-1731).
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