Bernoulli, Johann I an Barbaud (de Thiancourt), Henri-Alexandre (1720.01.03)
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Autor | Bernoulli, Johann I, 1667-1748 |
Empfänger | Barbaud (de Thiancourt), Henri-Alexandre, 1686-1739 |
Ort | Basel |
Datum | 1720.01.03 |
Briefwechsel | Bernoulli, Johann I (1667-1748) |
Signatur | Basel UB, Handschriften. SIGN: L Ia 675:Bl.120-123 |
Fussnote | Am Briefkopf eigenhändig "à Mr. de Thiancourt" und eigenhändiges P.S. |
Il y a deja quelque temps, que Mr. Votre Frere m'a rendu la tres obligeante lettre, que vous m'avez fait l'honneur, de m'écrire du 23 8bre 1719. Une infinité d'affaires m'ont empeché de vous y répondre plutôt, la meme raison m'empeche encore d'etre long dans ma reponse, elle est pourtant devenû assez longue contre mon attente, que voyci:
Je fus surpris de voir que sans le secours de l'analyse vous ayez pû découvrir une methode purement arithmetique pour reduire à des formules generales les sommes des puissances dont les racines suivent la progression naturelle des nombres, quoique je conçoive bien par ce que vous m'en dites, que votre methode demande, qu'on commence par la puissance la plus simple, c'est à dire par la premiere, et de là qu'on passe à la seconde, à la troisiéme et ainsi de suite, jusqu'à ce qu'on soit parvenu à celle dont on cherche l'expression pour determiner la somme des termes elevez à cette puissance, au lieu que par ma methode analytique je puis trouver immediatement la formule pour telle puissance des termes qu'on voudra; je ne laisse pas d'admirer votre penetration naturelle, et la force de votre imagination, qui sans autre aide tirée de l'art vous a mené si avant dans la contemplation des proprietés extremement abstraites, telles que sont celles des nombres; voila un bel échantillon par où vous faites voir, de combien vous seriez capable si vous vouliez faire honneur aux mathematiques et les cultiver avec une application serieuse, vous viendriez à bout des recherches les plus epineuses et vous feriez des decouvertes étonnantes. Je vai vous communiquer Mr. puisque vous le souhaittez, la methode analytique, dont je me suis servis, pour determiner les sommes des ces progressions, des puissances[1] qui ont pour racines les suites des nombres naturels: Je pose d'abord pour un lemme ce que vous avez aussi remarqué dans votre remarque quatrieme, sçavoir que le plus grand terme de la formule qui exprime la valeur des sommes[2] d'une puissance surpasse toujours cette meme puissance d'un dégré, dont la verité se manifeste pour peu qu'on y fasse d'attention: soit donc par exemple (car c'est la même methode pour tous les autres) la progression des quarrés, dont on démande la somme que je suppose étre (par , , , j'entens des coëfficiens inconnus des termes , , ) il s'agit de déterminer ces coëfficients, , , , ce que je fais de cette maniere: Comme la formule supposée doit étre universelle, pour la somme des quarrés quelque soit le nombre des termes , il faut qu'en augmentant d'une unité le nombre des termes, c'est à dire qu'en mettant au lieu de dans la formule supposée, celle qui en resulte, sçavoir
exprime la somme des termes dont le nombre est ; or cette meme somme est aussi égale à la somme precedente augmentée du dernier terme qui est ce qui me fournit cette équation
= ,
ôtant de part et d'autre ce qu'il y a de commun , il en viendra cette autre équation
=
Faisant la comparaison des termes homogenes, on trouve ,[3] , , ce qui me donne les coëfficiens cherchés, sçavoir , , , lesquels étant substitués dans la formule supposée , donneront la véritable , ou en reduisant au même denominateur , qui est la même que celle que vous avez trouvée.
Vous voyez Mr. que cette methode est aisée et generale pour telles puissances qu'on voudra, pourvû qu'on veuille toujours faire le calcul pour chaque puissance en particulier[4]: il y a cependent moyen d'exprimer par une suite generale la formule generale pour la puissance indefinie dont l'exposant soit nomé ; on demande donc la somme de cette progression , pour en trouver la formule je suppose suivant ma methode qu'elle est laquelle par l'augmentation d'une unité du nombre des termes , ou par la substitution de au lieu de , se change en celle ci
qui par consequent doit étre égale à la somme précedente jointe un dernier terme, c'est à dire
(NB. j'entens par des points[5] entre deux quantités, qu'on les doit multiplier, ainsi par exemple signifie que doit étre multiplié par ). Aprez la comparaison des termes homogenes deüement faite, vous trouverez generalement les coëfficients pour la puissance indefinie , à sçavoir , , , , , ,[6] , ,[7] , , ; c'est ainsi qu'il faut continuer jusqu'à ce qu'on ait autant de coëfficients qu'il y a des termes requis, pour la formule, c'est à dire autant qu'il y a d'unités en . Prenons par exemple la dixieme puissance des nombres naturels, on aura pour les coëfficients ce qui suit , , , , , , , , , , , en sorte que la somme de cette progression sera , si on applique cette formule au cas particulier de , et qu'il faille par consequent determiner la somme des mille premiers termes des nombres naturels elevés à la dixieme puissance, c'est à dire déterminer la somme de cette progression je dis que cette somme sera 91409924241424243424241924242500; comme vous dites Mr. que vous avez les formules toutes calculées des dix premiers puissances, vous pouvez les confronter avec ma formule generale, pour voir si elles y accordent, en ce cas vous seriez assuré que vous ne vous étés pas mépris dans votre calcul. On voit[8] au reste par l'expression generale des coefficients , , , ce que vous observez seulement pour les trois premiers termes, sçavoir que les coëfficients des premiers termes des progressions pour les puissances, qui augmentent successivement d'une unité, sont dans une progression harmonique decroissante, car ou fait une telle progression en augmentant continuëllement d'une unité. Les coëfficients des seconds termes ne changent jamais, parceque est toujours [.] Et les coëfficients des troisiemes termes forment entre eux une progression arithmetique, qui va en augmentant, parce que ou ou ou fait une telle progression si augmente successivement d'une unité. Mais vous vous trompez Mr. quand vous croyez, que les coëfficients des autres termes n'ont rien de regulier, car 1.o les coëfficients des quatriemes termes, comme aussi ceux des sixiemes termes, ceux des huitiemes et ainsi toujours les coëfficients des termes des nombres pairs dans l'ordre depuis le quatriéme sont toujours nuls ou = à 0. 2.do les coëfficients des cinquiemes termes sont toujours negatifs et sont dans une progression de nombres pyramideaux divisés par 120, car fait une progression des nombres pyramideaux en augmentant successivement d'une unité, or est toujours la cent-vingtiéme partie de . 3.o ainsi de même les coëfficiens des septiemes termes, des neufiemes, des onziémes, en un mot de tels termes qu'on voudra qui sont impairs dans l'ordre depuis les troisiemes, seront toujours dans un certain submultiple d'une progression de nombres figurés dont l'exposant est le nombre des termes dans l'ordre moins 2, j'appelle exposant le nombre qui exprime la dimension d'une progression figurée, par exemple 2 est l'exposant de la progression trigonale, 3 est l'exposant de la progression pyramidale, 4 est celui de la trigono-pyramidale, 5 de la pyramido-pyramidale, et ainsi de suite. Selon cette regle les coefficiens des septiemes termes font un sousmultiple de la progression pyramido-pyramidale, car il faut sçavoir que par l'augmentation continuëlle de d'une unité les coëfficients formeront la deuxcent-cinquante deuxieme partie des nombres qui sont dans cette progression qui est exprimée par . Il y a encore une chose qui est trop curieuse pour la passer sous silence: c'est que si signifioit un nombre negatif, ou une fraction, la somme de ces puissances seroit exprimée par une formule qui seroit composée d'un nombre infini de termes ou qui formeroit une suite infinie; de cette maniere on peut trouver la somme de plusieurs[9] nombres irrationels par une suite de nombres rationels; par ex. si je veux ajouter en une somme rationelle touts les cent termes de cette progression dont touts les termes sont irrationels, excepté ,, , , , , , , , . Je considere que n'est autre chose que , en sorte que est ici ce qu'etant mis à la place de dans les coëfficients generaux, , , , etc. on aura , , ,[10] , , , , ,[11] Or puisque est ici , la formule supposée se changera en une autre dont chaque terme sera rationel, parce que ou 100 est un nombre quarré, par consequent , , , , , ayant donc substitué tout cela dans la dite formule, on aura cette suite infinie de nombres rationels . Vous voyez Mr., que cette suite est si prodigieusement convergeante, qu'en prenant seulement les cinq premiers termes, la somme en differera déja si peu de la veritable valeur de , que l'erreur ne sera pas d'une dix million millionième[12] partie d'unité, que si on retranche de cette somme les nombres rationels qui se trouvent parmis les termes de la progression sçavoir qui font ensemble , il restera[13] à fort peu de chose prés = à la somme de toutes les racines[14] quarrées irrationelles comprises entre et ; on pourroit terriblement embarasser les Geometres en leurs proposant en forme de Problemes de trouver la somme de touts ces nombres irrationels en nombre rationel en sorte que l'erreur ne soit pas d'une 10000000000000me partie de l'unité, car ils ne s'aviseroient pas aisement de le resoudre par la methode expliquée ici, mais ils tourneroient plutot leur vuë du coté de la methode ordinaire, qui est de reduire separement chaque nombre irrationel dans une suite infinie de termes rationels, et ainsi il faudroit chercher quatre vingt dix suites (car il y a autant de nombres irrationels entre et , quoiqu'il soit vray qu'il y a parmi eux plusieurs de commensurable comme , , , item , , , etc. neantmoins il y en auroit encore assez d'incommensurables dont chacun demande[15] une suite particuliere); de toutes les suites il faudroit prendre autant de termes pour additionner qu'il[16] seroit nécessaire[17], afin que touts les restants pris ensemble ne fissent pas la petite partie nommée de l'unité, ce seroit là une peine insurmontable puisqu'il faudroit peut étre plus de 50 termes d'une seule suite pour faire que leur somme ne differe de la veritable valeur du nombre irrationel qu'elle exprime que d'une erreur plus petite[18], que la petite fraction marquée de l'unité; combien donc de termes ne faudroit il pas, pour que toutes les erreurs ensemble n'excedent pas cette petite partie d'unité? Il faudroit comme je croy quelques[19] centaines de termes de chaque suite, mais le moyen d'executer ce travail immense?
Ce qu'il y a d'admirable dans notre methode, c'est que bien loin que la multitude des nombres irrationels à additionner dans une somme rationelle rende l'operation plus difficile, au contraire elle est plutot achevée, car plus cette multitude est grande et plus convergeante devient notre suite; ainsi sera trouvée = à cette suite dont les seuls quatre premiers termes pris ensemble different moins de la veritable valeur de , que les 5 termes de la suite precedente ne different de .
Il y auroit encore bien des choses à dire sur ce sujet, comme par ex. la maniere d'appliquer cette methode à d'autres progressions que celles des puissances, pourvû qu'elles procedent suivant une loy donnée entre les nombres qui en doivent composer les termes[;] mais en voila deja assez pour une lettre, qui n'est dejà que trop grande; c'est pour la meme raison que je ne dirai rien presentement sur la difficulté que vous avez touchant la tendence des corps qui se meuvent en rond; il y auroit trop à écrire pour une lettre, mais je me reserve à vous éclaircir cette difficulté la premiere fois que j'aurai l'honneur de vous revoir: Je me contente pour le present de vous faire sentir, qu'il semble que vous ne distinguez pas la tendance du mouvement actuel d'un corps qui est agité en rond d'avec la direction de la force centrifuge qui en resulte; la premiere va sans contredit suivant la tangeante du cercle, que le corps agité décrit, mais l'autre est perpendiculaire à celle cy. Il y a deux principes incontestables fondés dans la nature meme qui prouvent assez ces deux verités: car 1.o tout corps en mouvement tend à continuer son mouvement en ligne droite, donc un corps, qui est obligé de décrire un cercle, c'est à dire un polygone infinilateral, en quelque coté de ce polygone qu'il se trouve il tachera de continuer son mouvement selon la direction de ce coté prolongé qui n'est autre chose que la tangeante du cercle au point où le corps mû se trouve dans un certain instant. 2.do si un corps mû en ligne droite vient à étre detourné à tout moment, la force qui le détourne le plus aisement sera celle dont la direction est perpendiculaire à la tendence du mouvement circulaire, ainsi la direction de la resistance du corps à cette force, sera tout à fait opposée, et partant aussi perpendiculaire à la tangeante, c'est en quoi consiste, l'effort qu'un corps mû en rond fait pour s'eloigner du centre, non obstant la tendence du mouvement circulaire qui a toujours pour direction la tangente. Ma femme vous est tres obligée de votre souvenir, elle vous fait ses compliments[20] reciproques. Je suis votre serviteur etc. Bernoulli
P. S.[21] Je consens que Vous communiquiez le contenu de cette lettre à Mr. Rieken, si Vous le trouvez à propos. Dans l'Essai d'Analyse sur les jeux de Hazard publié par feu Mr. de Monmort pag. 312, Edit. 2, Vous trouverez la methode exposée dans cette lettre appliquée aux puissances des nombres figurés. Je Vous souhaite une heureuse nouvelle année.
Bale ce 3. Janvier 1720.
Fussnoten
- ↑ Im Manuskript steht "puissance".
- ↑ Im Manuskript steht "somme".
- ↑ Die rechte Seite der Gleichung ist im Manuskript nicht lesbar. Sie ist mit "1" zu ergänzen.
- ↑ Im Manuskript steht "particulieur".
- ↑ Im Manuskript steht "point".
- ↑ Im Manuskript ist der letzte Faktor im Nenner aus "8" in "6" korrigiert.
- ↑ Im Manuskript steht im Nenner an Stelle des Faktors "3" eine Lücke. Der Faktor wurde in der Transkription nicht ergänzt.
- ↑ Im Manuskript steht "void".
- ↑ Im Manuskript steht "plusiers"
- ↑ Es müsste statt richtigerweise heissen.
- ↑ Das Zeichen hinter "" könnte auch als "," oder als "=" interpretiert werden.
- ↑ Im Manuskript steht "millionémie".
- ↑ Im Manuskript steht "restera".
- ↑ Im Manuskript steht "racine".
- ↑ Im Manuskript steht "demende".
- ↑ Im Manuskript steht "qu'ils"
- ↑ Im Manuskript steht "necessaires"
- ↑ Im Manuskript steht "petites".
- ↑ Im Manuskript steht "quelque".
- ↑ Im Manuskript steht "compliment".
- ↑ Das hier folgende P. S. samt Datum steht im Manuskript am oberen und unteren Rand von p. 1 des Briefes.
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