Bernoulli, Johann I an 'sGravesande, Willem Jacob (1726.02.24)

Aus Bernoulli Wiki
Version vom 13. Juli 2010, 06:54 Uhr von Maintenance script (Diskussion) (Importing text file)
(Unterschied) ← Nächstältere Version | Aktuelle Version (Unterschied) | Nächstjüngere Version → (Unterschied)
Zur Navigation springen Zur Suche springen


[Noch keine Bilder verfügbar]


Kurzinformationen zum Brief       mehr ...
Autor Bernoulli, Johann I, 1667-1748
Empfänger 'sGravesande, Willem Jacob, 1688-1742
Ort Basel
Datum 1726.02.24
Briefwechsel Bernoulli, Johann I (1667-1748)
Signatur Standort unbekannt
Fussnote



File icon keinbild.gif A Bale ce 24 fevr. 1726.

Monsieur

Le beau present que Vous m'avés fait de Votre traitté de Phisique[1] merite bien que je Vous ecrive cette lettre pour Vous marquer le plaisir, que cela m'a fait et la reconnoissance que je Vous temoigne maintenant: C'est encore un Surcroit d'obligation pour moi, que Vous aiés bien voulé[2] ajouter à ce present celui de Vos deux petites pieces qui portent pour titre Remarques sur la possibilité du mouvement perpetuel, Et Essai d'une nouvelle theorie du choc des Corps; Comme j'ai trouvé des choses qui m'interessent en quelque façon, Vous pouvés bien Vous imaginer Monsieur, que j'ai lû ces deux dernières pieces avec beaucoup d'attention; aussi prendrai-je la liberté ici de Vous en parler, aprés que je Vous aurai dit quelques mots sur Votre Traité de Physique que Vous nommés Introduction à la Philosophie de Monsieur Neuton: Je voi bien que c'est un recueil d'un Grand nombre de belles experiences, mais dont la plus part n'appartiennent nullement à Mons. Neuton, et ne regardent pas plus sa Philosophie en particulier que celle de tout autre qui veut qui on joigne l'experience à la raison. Selon ce que Vous dites dans la preface devant le premier Tome Vous avés jugé inutile de mentioner où se touvent les File icon keinbild.gif experiences inserées dans Votre livre. J'approuve ce dessein, car il importe peu pour l'avancement des sciences de scavoir[3] qui est le premier auteur d'une telle ou telle decouverte, unde habeas quaerat nemo sed oportet habere. Cependan[t] cette loi que vous Vous étes dictée en faisant votre livre dev[roit] etre observée Generalement, par rapport à Mons. Neuton aus[si] bien que par rapport à d'autres, de peur que Votre lecteur ne commette quelque inju[s]tice, etant induit à attribuer à Mons. Neuton quelque chose qui peutêtre n'est pas de lui, en voici un exemple: Dans l'avis au lecteur, devant le second tome, Vous dites, que Votre propo[s] etoit de donner dans ce tome une idée generale des principales decouvertes de Physique de Mons. Neuton; Qui est ce, qui en lisa[nt] cela, ne croiroit pas que tout ce qu'il y va touver est, ou de Mo[ns.] Neuton ou du moins deduit de sa Philosophie? mais de grace mon cher Monsieur, dites moi, ma decouverte du Phosphore mercurial quelle obligation a-t-elle à Mons. Neuton ou à sa Philosophie? cependant cette decouverte est inserée dans Votre livre Tom. 2, pag. 8, Exper. 10 avec celle de la page suivante que Mons. Hauksbee a tiré de la mienne. Ainsi donc un lecteur pas assez instruit de l'origine des decouvertes sera porté à croire sur Votre foi, qu'on est redevable de File icon keinbild.gif celle ci à Monsieur Neuton, non sans prejudice du veritable Auteur: Ne pensés pas Monsieur, que je dise cela pour me plaindre de Vous, c'est plutot pour Vous avertir en ami de ce que d'autres Gens pourroient peutetre trouver à redire dans la maniere dont Vous avés usé en composant Votre ouvrage, envers ceux qui pouroient pretendere avoir quelque part aux inventions independemment de Mons. Neuton et de sa Philosophie. En effet je viens de voir un traité allemand sur des Experiences de Physique[4] où l'Auteur que est Mons. Wolff Professeur en mathematique à Halle en Saxe faisant mention de cette meme experience sur la lumiere du Mercure dans le vuide trouve mauvais que Vous ne nommiés pas les auteurs dont Vous avés emprunté leurs decouvertes; Mons sGravensande (dit il) a exactement decrit les Essais de cet homme (Mr. Hauksbee) quoi qu'il ne lui ait pas fait l'honneur, non plus qu'aux autres dont il a ramassé les inventions, de les citer; Personne autre que le seul Mons. Neuton a eu l'honneur d'etre exprimé sur le Titre et dans la preface du livre, d'une maniere plus que convenable; quoi qu'il ne soit marqué nulle part dans tout l'ouvrage, ce qui est proprement dû à Mons. Neuton. Vous voiés Mons. ce que l'on en pense ailleurs. Mais: outre celà ne croiés Vous pas que bien des Gens seront choqués en lisant dans Votre preface devant le second Tome, ce qui suit Quibus in fonte ipso, id est in nostri Philosophi (Neutoni) scriptis, poterit ea haurire ad quae ne File icon keinbild.gif quidem praestantissimi Philosophi potuere attingere, et qua nis[i] cum Mathematicis diligentioribus, non communicavit Neutonu[s.] Je suis un de ceux qui estiment, et admirent Mons. Neuton autant qu'on le doit faire à cause de son rare merite, je ne Lui envie nullement les eloges qu'on Lui donne, car je Lui en ai donné moi meme en toute occasion; Mais je n'approuve pas qu'on l'encense aux depen[ses] de tous les autres Mathematiciens et Philosophes, ni qu'on fonde ses louanges sur la ruine de la reputation de tant d'Illustres hommes qui ont si bien merite de la Philosophie et des Mathematiques. Vous dites qu'on peut puiser dans les ecrits de Mr. Neuton des choses aux quelles les plus Excellents Philosophes n'ont jamais pu atteindre. Pardon Monsieur, c'est là le langage de touts les Anglois, qui font de Mons. Neuton Leur Idole, au mepris de tous les Etranger[s] des quels ils ne scauroient souffrir qu'on parle honorablement. Je me mets dans le rang des Geometres fort mediocres et infiniment au dessous de Mr. Neuton mais pourtant je l'ai corrigé en bien des rencontres où il s'etoit mepris, particulierement dans ses Princ. Phil. Nat. j'ai resolu des problemes et des difficultés, que lui mème, selon son propr[e] aveu, ne pouvoit pas resoudre, temoins quelques lettre[s] File icon keinbild.gif d'Angletere que je puis produire, aussi n'en trouve-t-on rien dans son livre, où naturellement il en devoit traiter, avec quelle justice dites Vous donc, que l'on puise dans Mr. Neuton, ce, à quoi personne autre ne scauroit atteindre, comme si on ne scavoit autre chose que ce qu'il a bien voulu nous communiquer.

Avant que de quitter ce chapitre, je vai transcrire ici ce que j'ai trouvé dans les Actes de Leipsic de 1720 au mois de Mai, où on fait la relation du premier tome de Votre ouvrage;[5] Sur la fin de la page 223, le collecteur des Actes finit sa relation par une reflexion que Vous n'avés pas encore vû; la voicy: Non videtur autor (dit il) historia Philosophiae Experimentalis satis esse peritus, cum pleraque eorum, quae habet, experimentorum ante Neutonum extra Angliam facta fuerint. Methodus etiam probandi per experimenta propositiones de motu geometrice demonstratas a Galileo, Hugenio ab iisque fuit usurpata. Et de Machinis simplicibus olim apud nostros experimenta dedit Jungenickel[6], homo quidem illiteratus, sed Mechanica non imperitus, in Clave Machinarum. Imo jam Stevinus talia dedit in staticis. Je croi que cette reflexion confirme assés que le Public n'en juge pas autrement que moi. En commencant cette lettre, je ne pensois pas m'etendre si loin sur File icon keinbild.gif vôtre ouvrage, qui est d'ailleurs veritablement beau, et tres digne de son auteur.

Je vai maintenant vous entretenir sur Vôtre Essai sur le chocs des corps:[7] avant toutes choses je dois Vous dire, que j'ai été bien édifi[é] de voir que la verité commence peu à peu de lever la tête, j'espere qu'il ne se passera plus si long temps qu'elle ne triomphe entierement; non seulement de l'aveuglement, mais de la raillerie et de la fierté des envieu[x] qui la haïssent par cette seule raison qu'elle n'a pas pris naissance chez eux: Vous m'entendez bien de quelle verité je parle, c'est celle dont Vo[us] venez de prendre la defence, sçavoir que la force d'un corps en mouvem[ent] est proportionel non p[oin]t à sa simple vitesse, selon le sentiment commu[n] mais au quarré de sa vitesse, et que parconsequent, les forces de deu[x] corps inegaux sont en raison des produits de leurs masses par les qu[ar]rez de leurs vitesses, c'est à dire en raison composée de la simple [des] masses, et de la doublée des vitesses. Enfin donc Monsr., Vous étes don[c] converti, c'en est assez; mais d'où vient si tard? les raisons solides n'étoient-elles pas suffisantes pour vous convaincre? Vous falloit-il justement les Experiences pour Vous ouvrir les yeux; les Experiences dis-je faites par des boules qui tomboient de differentes hauteurs pour s'enfoncer dans la terre glaise, comme Vous l'exposez p. 21 sq. apre[s] Monsr. le M. Poleni, qui en place de terre glaise avoit pris du suif selon le reçit, qu'il en fait dans son Traité de Castellis,[8] mais les Anglois dont il paroit que Vous avez epousé les sentimens, et pris parti sous leur drapeau, au moins en fait de phisique, les Anglois dis-je, que diront-ils, quand ils vous verront tomber dans une des Heresies de Msr. Leibnitz, car chez eux c'est heresie tout ce qui vient originairement de ce grand homme, c'est dommage pour eux que la 1.ere File icon keinbild.gif découverte de la veritable estimation des forces n'ait pas été faite par Msr. Neuton, ils n'auroient pas manqué d'en tirer matiere d'exalter la clairvoyance de leur nation; et sujet de triompher de l'aveuglement des autres, au lieu que presentement c'est une erreur, c'est une reverie, c'est une absurdité puerile, que de penser avec Msr. Leibnitz que la force des corps soit proportionelle aux masses et aux quarrez des vitesses, et qu'ainsi les quantitéz des forces soit bien differentes de ce qu'on appelle communement quantité de mouvement. Je ne dis rien qui ne soit vray au pied de la lettre, regardez s'il vous plait l'exemple de Msr. Clarke, avec quelle hauteur, avec quelle fierté ne traite-il pas Msr. Leibnitz, et sa nouvelle doctrine, touchant la force des corps? en voici un échantillon; Msr. Clarke dans ses nôtes à la 5.me replique à Msr. Leibnitz, la quelle ne fut écrite, je crois, qu'apres la mort de celui ci à la page 328 de la premiere édition, se sert de ces termes qui sentent un souverain mepris pour Msr. Leibnitz, "ce qui a donné occasion", dit-il, "à Msr. Leibnitz de ce contredire sur cette matiere, c'est qu'il a supputé par une meprise tout à fait indigne d'un philosophe, la quantité de la force impulsive dans un corps qui monte etc. mais Msr. Leibnitz se trompe fort en faisant cette supposition, p. 332 Msr. Leibnitz confond les cas où les temps sont egaux, avec les cas où[9] les temps sont inegaux. Il confond particulierement etc. ce qui est une contradiction manifeste. La contradiction est la même etc. p. 338, tant il est vray que le sentiment de Msr. Leibnitz sur ce sujet est rempli d'absurditez. P. 326 tout ce que Msr. Leibnitz dit sur cette matiere paroit rempli de confusion et de contradictions. P. 340 Msr. Leibnitz a recours à un autre subterfuge, en disant que le mouvement et la force ne sont pas toujours les mêmes en quantité, mais ceci est aussi contraire à l'experience. Apres ces reproches d'erreurs et de mepris indignes d'un File icon keinbild.gif Philosophe, de confusion, de contradiction, d'absurditez, de subterfuge[10] Msr. Clarke se donnant un air de maitre, conclut enfin avec une autorité imperiale, et decisive contre Msr. Leibnitz en ces termes, pag. 342 "la force" (dit-il) "dont nous parlons ici, est la force active, impulsive, et relative, qui est toujours proportionée à la quantité du mouvement relatif"; et de peur qu'on ne sente pas assez que c'est le nouveau dogme de Msr. Leibnitz qu'il Vous terrasser comme un autre Hercule, il ajoute dans ces notes de la même page ce[s] mots, "c'est à dire proportionée à la quantité de la matiere et à la vitesse, et non (comme Msr. Leibnitz l'assure Act. Erud. ad An. 1695 p. 156) à la quantité de la matiere, et au quarré de la vitesse".

Hé bien, Msr., est-il possible que la verité, toute verité, quelle est, soit le sujet de moquerie en Angleterre, par cela seul que Msr. Neuton n'a pas encore trouvé à propos de la reconnoitre, et qu'aparement il ne reconnoitra jamais, parce que c'est Msr. Leibnitz qui l'a découverte le premier, cela suffit déja, car en Angleterre on ne veut rien lui accorder en fait d'invention; Mais vous qui avez enfin embrassé cette verité, et qui avez[11] comme il paroit un assez grand ascendant sur les Anglois, n'avez vous pas encor[e] trouvé le moyen de les convertir aussi, et de leur faire gouter cette proposition, que la force active est comme le produit de la masse par le quarr[é] de la velocité, dont vous avez même donné une demonstration à la page 26 de Vôtre Essai.[12] Cette demonstration est à la verité bonne et belle si on la lit avec attention: cependant un homme prevenu de prejugé pour l'opinion vulgaire y trouvera je ne sçai quoi d'obscur dans la maniere d'expliquer l'action des petits ressorts pliez, qui en se debandant doivent comuniquer successivement au corps une certaine vitesse, sur tout il ne verra pas clair ce que Vous dites pur ajouter toujour un nouveau petit degré de vittesse, il faut qu'autant de petits ressorts se débandent à la fois, qu'il y a des petits degrés deja acquis de vitesse au corps . Il pourra croire, que tous les ressorts , , , ,[13] etc. commencent à se debanFile icon keinbild.gifder tous à la fois et non pas successivement selon vôtre hypotese en sorte que le ressort , qui est le plus proche et contigu au corps , ne sçauroit se débander qu'au même instant le plus éloigné ne se debande aussi, quoi que moins amplement que le premier, c'est à dire que la quantité du debandement de chaque ressort ou la perte de sa pression, qui se fait dans le même temps pendant qu'il se debande est proportionelle au nombre des ressorts qui le suivent, y etant compris lui même. Quant[14] au reste votre demonstration me plait tres fort, quoi que je doute que les opiniatres s'y rendront; je ne sçai si Vous avez jamais vu celle que j'ai trouvée, il y a pres de 30 ans, et dont Msr. Poleni fait mention;[15] je l'ai communiquée à Msr. Wolffius, qui l'a depuis publiée dans le 1.er Tome de ses Elements de Mathematique p. 594. Il semble que Vous n'avez pas vue cette demonstration, car si Vous l'aviez vuë Vous Vous y seriez rapporté sans en chercher un autre, car elle est entierement Geometrique, et convaincante fondée sur la seule composition du mouvement par laquelle je fais voir que quand un Corps a precissement autant de vitesse qu'il en faut pour bander un ressort contre lequel il heurte perpendiculairement ce même corps poura avec le double de vitesse bander non seulement deux mais quattre ressorts pareils au premier, et qu'avec le triple de vitesse il bandera 9 de ces ressorts et ainsi de suite.

Puis que je me suis mis en train de Vous écrire une grande lettre, je veux bien Vous la communiquer, j'espere qu'elle Vous fera plaisir, d'autant plus que c'est par cette même demonstration que j'eu le bonheur il y a environs 23 ans, de convertir feu Msr. de Volder Vôtre predecesseur,[16] rigide Cartesien, s'il en fut jamais, apres que Msr. Leibnitz employa inutilement tous ses arguments (dans un long commerce de lettre qu'il y avoit entre eux deux, et qui passoit toujours par mes mains)[17] pour le convaincre de la verité. Il seroit à souhaiter que les Heritiers de Msr. de Volder voulussent Vous communiquer ses papiers, Vous y trouveriez une de mes lettres, datée je crois dans l'an 1700 qui contient la demonstration dont je Vous parle, et dont voici le contenu.[18] [19]File icon keinbild.gif [20]"Concevez que le corps aille [Figur][21] avec la vitesse choquer obliq[ue]ment le ressort : soit l'angle [de] l'obliquité de 30 degrés, afin que la perpendiculaire devienne , soit la vitesse comme 2, soit aussi la resistance d[u] ressort precisement telle que p[our] le plier il faille un degré de vitess[e] dans le corps , si ce corps y heurtoit perpendiculairement. D'où il suit qu'apres le choq oblique du corps avec la vitesse de 2 deg[r.] la quelle est composée (en vertu de la composition du mouvement) de [1] et de , [][22], le corps perdra entierement le mouvement perpendiculaire par et retiendra celui par , ainsi le corps apres avoir plié le premier ressort , continuera à se mouvoir dans la direction avec la vitesse : Concevez qu'au poin[t] soit placé un autre ressort semblable au premier, mais que l'angle de l'obliquité soit tel que la perpendiculaire soit . Il est clair, que le mouvement par etant composé de deux collateraux par et par , celui par se consumera en pliant le ressort et l'autre par subsistera, dont la vitesse se , d[onc] le Corps apres avoir plié le second ressort , continuera sur la direction , avec la vitesse ; au point imagin[ez] Vous le troisieme ressort, que le corps rencontre sous l'angle dem[i]droit , afin que la perpendiculaire sur la situation d[u] ressort devienne ; Il est manifeste que le mouvement par , composé de celui par et de celui par[23] employera le premier par [à] plier le ressort ; et que l'autre par continuera, dont la vit[es]se sera encore ; donc le corps apres avoir deja plié 3 ressorts conserve encore un degré de vitesse sur la direction ainsi File icon keinbild.gif avec ce degré de vitesse qui lui reste il pliera le 4.me ressort sur lequel je suppose qu'il choque perpendiculairement si bien que le corps avec deux degré de vitesse a la force de plier quatre ressorts, dont chacun demande un dégré de vitesse dans le corps pour etre plié; Or ces 4 ressorts pliés sous l'effet total de la force du corps mû avec 2 degrez de vitesse parce que toute cette vitesse se consume en les pliant et un seul ressort plié est l'effet total de la force du même corps mû avec un degré de vitesse, parce que l'on suppose que la resistance de chaque ressort est telle, qu'elle peut detruire precisement toute cette vitesse d'un degré du corps ; puis donc que les effets totaux sont comme les forces, il faut que la force du corps mu avec 2 degrés de vitesse soit 4 fois plus grande, que la force du même corps mu avec un degré de vitesse.

On demontrera de la même maniere, qu'une vitesse 3ple, 4druple, 5duple, etc. fait avoir au Corps une force 9duple, 16.ple, 25.ple etc. parce qu'il poura plier 9, 16, 25, etc. ressorts egaux, avant que de s'arreter; Il n'y a qu'à donner à une obliquité convenable au premier ressort, pourque soit à comme 1 à 2, 3, 4, 5, etc. et faire les autres obliquitez selon que chaque cas exige. D'où il suit generalement que la force d'un corps est proportionelle au quarré de sa vitesse et non point à sa simple vitesse c. q. f. d.[24] Que Msrs. les Anglois se roidissent tant qu'ils voudront contre la nouvelle doctrine de Msr. Leibnitz, qu'ils la sifflent, qu'ils s'en moquent avec un mepris affecté; Que Msr. Clarke la traite de ridicule, d'absurde et d'indigne d'un Philosophe, je les defie tous et chacun d'eux de pouvoir repondre à ma demonstration, n'y d'y avoir à redire. Ils feront peut etre des chicanes, mais je suis assuré qu'ils ne produiront rien qui ne soit frivole, et dont la foiblesse ne saute aux yeux.

Vos experiences, Msr., faites avec des boules et de la terre glaise ou avec File icon keinbild.gif du suif selon Msr. Poleni, confirment tres bien ma demonstration; mais j'aprehende que Msr. Clarke et les autres adversaires ne Vous fassent des objections semblables à celle qu'ils ont faite à Msr. Leibnitz, contre les hauteurs verticales, aux quelles les corps pesants peuvent monter avec diferents degrés de vitesse, disant que Msr. Leibnitz n'avoit pas raison de prendre ces hauteurs pour les mesures des forces parce qu'elles n'etoient[25] pas parcourues dans le même temps ou en temps egaux: Car ne croyez Vous pas Msr. qu'ils feront aussi ces sortes d'exceptions contres vos experiences de la p. 22.me, la premiere par ex. où vous dites "qu'ayant laissé tomber la boule trois de la hauteur de 9 pouces, et la boule un de la hauteur de 27 pouces, les enfoncements dans la terre glaise ont été egaux entr'eux." Ne prouvez vous pas diront ils que les forces de ces 2 boules soient egales, parce que les enfoncements quoique egaux en eux même, ne le sont pas dans les circonstances, vu que l'enfoncement de la boule un commence à se faire avec plus de vitesse et s'acheve en moins de temps, que l'enfoncement de la boule trois; ce qui selon eux suffira deja pour croire que ces enfoncemens égaux, ne marque pas une égalité de force dans les corps qui les ont faits. Msr. Poleni à qui j'avois fait la même remontrance, a bien senti la difficulté mais il n'y a pas repondu, il n'en est pas de même des ressorts egaux à plie[r] dont je me sers[26] dans ma demonstration, car chacun d'eux venant à être plié de la meme maniere savoir par l'impulsion d'un même corps avec une vitesse perpendiculaire toujours egale il est visible que le nombre de ses ressorts pliez doit mesurer exactement la force totale du corps, qu[i] consume toute sa vitesse en les pliant successivement. Pour juger par l'effet de la grandeur de sa cause, il faut que l'effet soit homogene et uniforme en toutes les parties et en toutes les circonstances; alors la multitude de ses parties egales est sans doute proportionelle à la cause qui les a produites, car quelle autre maniere peut on avoir de comparer des causes des differentes intensité? come on les appelle dans les Ecoles, or c'est ce que j'observe dans ma demonstration.

File icon keinbild.gif Je passe Mr. à vos remarques sur la possibilité du mouvement perpetuel faites à l'occasion de la machine de Cassel dont Vous ditez que Vous avez examiné les effets;[27] il y a deja plusieurs années que l'on m'a ecrit d'Allemagne des merveilles de cette machine,[28] on m'en a même communiqué la figure exterieure, qui fait voir que c'est une rouë garnie d'une espece de pendule qui doit egaler le mouvement. Msr. Orfiré, c'est le nom de l'inventeur, l'a fait voir d'abord à Leipsic, et en quelques autres places de l'Almagne on m'assure presentement qu'il en a communiqué le secret à Msgr. le Landgrave de Hesse, en lui faisant voir la structure interieure le la Roue; et que là dessus Son A. S. doit avoir dit à ses Ministres qu'elle trouvoit que cette machine est un veritable mobile perpetuel, et encore si simple et si aisé qu'elle etoit etonnée que personne avant Msr. Orfiré n'ait pu reussir à trouver quelque chose de semblable. Pour moi je ne sai ce que j'en doit croire, au moins il me semble que le mouvement perpetuel purement artificiel est impossible, mon sentiment est fondé sur la Loi Generale de la statique, en vertu de laquelle il faut que le commun centre de gravité de toutes les parties d'une machine qui sont en mouvement descendent continuellement; car dès qu'il ne poura plus descendre, le mouvement s'arretera, à moins qu'on ne le remonte, comme on le pratique dans les horloges, et en d'autres automates; je vois que Vous étés d'un sentiment contraire; Vous donnez pour raison p. 18.me que les Loix de la Nature nous sont trop inconnues pour en demontrer l'impossibilité du mouvement perpetuel.

Mais Msr. qu'est-il besoin de connoitre toutes les Loix? si une seule m'est connue, la quelle me dicte clairement qu'une telle, est telle chose, est contradictoire,[29] cela me suffit deja pour en conclure l'impossibilité d'une telle chose, quoi qu'il en soit, du reste des loix qui me sont inconnues etant assuré que les loix de la nature ne se contredisent ni ne se detruisent pas l'une l'autre.

Ce que Vous ajoutez "qu'il y a dans la nature des principes actifs pour retablir le mouvement qui se perd en tant de rencontres; qu'on decouvre de tels principes dans toutes les petites parties dont les corps sont composé, et qu'on en voit des effets bien considerables, dans les ressorts, dans les fermentations, et dans une infinité d'autres occasions, qu'il y auroit quelque Témerité d'assurer File icon keinbild.gif qu'il soit contradictoire de mettre à profit ces principes"; Tout cela je Vous avoue prouve bien que le mouvement perpetuel en tant qu'il est produit, ou du moins aidé par un mouvement exterieur, etabli dans la nature des chose[s] n'est pas absolument impossible, au contraire on en voit l'existence, tels sont ex. gr. les mouvements des animeaux que Vous alleguez, les mouvements des eaux des rivieres, et de la Mer, celui de la matiere Magnetique et une infinité d'autres semblables. Mais souvenez Vous Msr. de la definition que Vous donnez page 4.me de ce qu'on appelle en mechanique mouvement perpetuel. Vous dites que "c'est une machine dont le princi[pe] du mouvement, ne depend d'aucun agent étranger, et dont le mouvement ne s'a[r]reteroit jamais si les materieaux ne s'usoient pas". Or je Vous demande si ces sortes de principes actifs empruntez de la nature pour faire jouer une machine ne sont pas des agents etrangers qui ne permettent plus à cette machine de porter le nom de mouvement perpetuel purement artificie[l] ou se seroit tout au plus un mobile perpetuel mixte c'est à dire où l'art et la nature concourent à en perpetuer le mouvement. Je suis en effet tres persuadé que la machine de Cassel n'est que de ce Genre y ayant peut etre dans l'interieur des aimans ou certains ressorts qui peuvent entretenir le mouvement imprimé à la Rouë; Je crois même avoir decouvert le moyen d'en faire une semblable; je souhaiterai seulement que quelque habile ouvrier peut executer mon projet, en ce cas je me fais fort de reussir. On me dit que Msr. Orfiré demande la recompense de 100000 écus pour la communication du secret, pour moi je me contenterai de beaucoup moins.

Quant[30] au reste Vous avez tres bien demontré que le sentiment commun, quand on croit que la force d'un corps en mouvement est proportionelle à sa vitesse, emporte necessairement une augmentation de force c'est à dire le mouvement perpetuel. Mais c'est justement ce que Msr. Leibnitz a deja démontré il y a fort long temps, lors qu'il etoit en dispute sur cela avec Msr. Papin et d'autres.

En voila bien assez sur vos deux belles pieces, il est vray que ce n'est pas tout, car elles m'ont donné occasions à plusieurs autres reflections, que je vous aurois aussi communiqué si je n'avois eu peur File icon keinbild.gif de fatiguer Votre patience pour une lettre qui est deja si furieusement longue.[31]

Je Vous prie Msr. de remercier de ma part par occasion Msr. Maclaurin du present qu'il m'a fait de son livre,[32] je l'ay parcouru en hâte, mais il ne m'a pas été possible d'examiner le tout avec attention, n'y de faire les calculs extremements prolixes et embarrassant que demande sa description des lignes Courbes. Je me suis un peu plus attaché à la section 4.me de la seconde partie de son livre, parce que j'y ai trouvé des choses qui me regardoient[33] plus particulierement; Touchant les Courbes que décrivent des projectiles agitez, autour d'un centre vers lequel ils sont poussé ou attirez par de certaines forces qu'on nomme centrales ou centripetes: il a daigné prendre de moi en plusieurs endroits ce que j'ai publié autresfois sans qu'il ait fait semblant de rien: Par exemple, presque tout ce qu'il a sur la Spirale Hiperbolique se trouve dans mon écrit que je fis inserrer dans les Actes de Leipsic de 1713.[34] J'ay le premier enseigné la veritable maniere de supputer la Loi de la resistance et de la densité des milieux, ressistant par raport à la force Centrale pour que le projectile décrive une Courbe donnée, car tout ce que Msr. Neuton avoit écrit sur cette matiere dans la premiere édition de ces principes philosophiques, etoit fautif;[35] aussi a-t-il reconnu mes corrections et les a suivies dans la seconde edition: Mais Msr. Laurin nous veut assurer qu'il a trouvé mon Theoreme General quelques années avant qu'il ait vu mon traité qui le contient, et qui est publié dans les Memoires de l'Accademie de Paris, comme s'il n'avoit pas pu voir ce Theoreme dans les Actes de Leips. de 1713 où il se trouve aussi, et les quels Actes il avoit necessairement vu, lors qu'il composoit son livre, puis qu'il en a emprunté comme je Vous l'ai dit: il est aussi plaisant que pour extenuer ma decouverte il tache d'insinuer qu'il etoit facile d'y parvenir par le moyen de quelque propositions de Mr. Neuton, quoique cependant Mr. Neuton lui même n'y pu pas parvenir, et ne put traiter cette matiere sans erreurs. File icon keinbild.gif Certainement Msr. Laurin auroit mieux fait de n'en point parler, que de trahir sa conscience par un motif de flaterie pour Mr. Neuton, et de jalousie et d'envie qu'il porte à nous autres etrangers à l'exemple de plusieurs des ses compatriotes: car que gagne-t-il par là sinon que les honnetes gens en jugent peu favorablement. Lisez seulement la relation de son livre qui se trouve dans les Actes de Leipsic du mois de Juin de cette année, où l'Auteur de la Relation fait precisement la même remarque disant[36] "que Ms[r.] Laurin s'est servi de mon Theoreme, mais qu'avec cela il a eu soin de donner à connoitre, qu'il l'avoit trouvé quelques années avant que d'avoir vu mon traité dans les Memoires, de peur qu'on ne crut qu'il eut tout pris quelque chose d'un Allemand, imitant en cela la coutume de quelques autres Anglois".

D'ailleurs que pensez Vous Msr. de l'encens que Msr. Laurin prodigue à Msr. Neuton avec su grande profusion? selon lui c'est le seul Msr. Neuton qui ait éllevé les sciences au plus haut fait de dignité et de splendeur; c'est lui seul qui a trouvé un Nombre infini de verités tres obscures de la philosophie naturelle, nec cujus quam Vestigiis insistens, nec a quoquam in posterum aequandus:[37] Selon Mr. Laurin (car c'est le sens naturel de ses experssions) personne n'a rien contribué à l'avancement de la Geometrie et de la philosophie naturelle; on en est redevable à Msr. Neuton. Il dit aussi quelque part, que les progrés de ce siecle dans la Geometrie sont si grands et si subites qui feront l'etonnement des siecles à venir, à moins que chaque siecle n'ait son Msr. Neuton, comme si l'unique Msr. Neuton nous avoit donné tout ces progres et qu'il fut le seul capable de les comprendre sans etonement. Je vous ai deja dit Msr. que j'estime M.r Neuton et son rare merite, je l'estime dis-je comme un des plus grands genies de notre siecle, mais je vous avouë franchement que je plains sa foiblesse, il veut que les siens l'adorent, qu'ils l'encensent presque comme un Dieu, qu'ils l'élevent au dessu du sort des mortels, il voit toutes ses louanges excessives qu'on lui donne avec des marques de dedain et de mepris pour tout le reste des Geometres et des philosophes; il voit les basses flateries, il les goute, et bien plus il les approuve, et les autorise publiquement. Car je Vous prie! la permission positive qu'il donne par son Imprimatur File icon keinbild.gif S. S. Neuton P. R. S. n'est ce pas autant qu'une approbation publique de tout ce qu'il y a dans le livre de Msr. Laurin, par consequent de cette pompeuse dedicace farcie de ce que l'ame la plus flateuse et la plus esclave peut inventer, pour s'aquerir les bonnes graces de son maitre?


Fussnoten

  1. Willem Jacob 'sGravesande: Physices elementa mathematica experimentis confirmata, sive Introductio ad Philosophiam Newtonianam, Lugduni Batavorum (Leiden) 1720.
  2. Im Manuskript steht "voula".
  3. Im Manuskript steht "des scavoir".
  4. [Text folgt]
  5. Willem Jacob 'sGravesande: Physices elementa mathematica experimentis confirmata, sive Introductio ad Philosophiam Newtonianam, Lugduni Batavorum (Leiden) 1720.
  6. Andreas Jungenickel, Clavis machinarum, 1661
  7. [Text folgt]
  8. [Text folgt]
  9. Im Manuskript steht "et".
  10. Im Manuskript folgt hier die gestrichene Passage "et de telles autres duretez, qu'on ne diroit pas au plus vil des hommes sans se departir de toute civilité".
  11. Im Manuskript steht "avec".
  12. [Text folgt]
  13. Wie die Figur auf Seite 10 dieses Briefes belegt, hat Johann I Bernoulli die bei diesem Beweis verwendeten Federn (elastra) mit einem spiralförmigen Symbol gekennzeichnet. Dies findet sich auch in seinem Brief an Christian Wolff von 1710.04.25 und in der Figur zu Johann I Bernoullis Beweis, der in Wolffs Elementa Matheseos universa, T. I, Halae Magdeburgicae (Renger) 1713, pp. 594-595 abgedruckt ist.
  14. Im Manuskript steht "Quand".
  15. [Text folgt]
  16. [Text folgt]
  17. [Text folgt]
  18. [Text folgt]
  19. Am unteren Rand der Seite findet sich von anderer Hand der Hinweis "voyez Oper. Bernullii Tom. 3 pag. 54.". Er verweist auf Kapitel 9 von Joh. I B. Op. CXXXV, Discours sur les lois de la communication du mouvement, Paris 1727, wo dieser Beweis ebenfalls geführt wird.
  20. Hier beginnt Johann I Bernoullis freie Übersetzung der entsprechenden Passage aus seinem Brief an Burcher de Volder von 1700.02.13.
  21. link 57485 \_Figur/link
  22. Die eckigen Klammern, in denen der Schreiber die Längen der Strecken und angibt, finden sich im Manuskript.
  23. Im Manuskript steht "p".
  24. Hier endet Johann I Bernoullis freie Übersetzung der entsprechenden Passage aus seinem Brief an Burcher de Volder von 1700.02.13.
  25. Im Manuskript steht "etoit".
  26. Im Manuskript steht "sert".
  27. [Text folgt]
  28. [Text folgt]
  29. Hier ist eventulell "est telle" wegzulassen.
  30. Im Manuskript steht "Quand".
  31. Hier folgt ein "etc.", das auf eine beim Abschreiben weggelassene Passage hindeuten könnte.
  32. [Text folgt]
  33. Im Manuskript steht "regardoit".
  34. [Text folgt]
  35. [Text folgt]
  36. [Text folgt]
  37. [Text folgt]


Zurück zur gesamten Korrespondenz