Bernoulli, Johann I an Crousaz, Jean Pierre de (1722.11.11)
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Autor | Bernoulli, Johann I, 1667-1748 |
Empfänger | Crousaz, Jean Pierre de, 1663-1750 |
Ort | Basel |
Datum | 1722.11.11 |
Briefwechsel | Bernoulli, Johann I (1667-1748) |
Signatur | Basel UB, Handschriften. SIGN: L Ia 656, Nr.15 |
Fussnote | Am Briefkopf eigenhändig "à Mr. de Crousaz" |
Monsieur
Les raisons pour excuser vôtre silence, que Vous allegués dans vôtre derniere,[1] que Mr. de Rochefort me remit le lendemain de son arrivée, sont trop fortes pour n'y pas acquiescer; vous etes le maitre de vôtre tems et il seroit injuste à moy de vouloir exiger, que vous m'en rendiez compte. C'est vôtre pure civilité, que vous m'ayez bien voulu faire le recit de vos occupations; je vous en suis obligé.
J'offrois à Mr. de Rochefort mes services, dont il poura disposer; Comme il me temoignoit envie d'apprendre l'algebre, je Lui dis que cela venoit fort à propos, parcequ'un autre m'avoit justement demandé la meme chose; et qu'ainsi il pouroit se joindre à Luj, pour que je leur donnasse des Leçons à eux deux, il me repondit d'en ecrire à M. son Pere me priant d'attendre encore une huitaine de jours, ce que je Luj accordaj. Mais au bout de ce terme il revint chez moy et donna à entendre à mon fils (car j'etois absent de la maison) qu'il avoit reçu une lettre, par laquelle on Luj fait sçavoir qu'on Luj a donné une charge dans sa Patrie, à laquelle l'etude des mathematiques ne seroit pas convenable, c'est pourquoy il trouvoit à propos d'abandonner le dessein de s'y appliquer; du depuis je ne l'aj pas vu; mon second fils, qui est aussi medecin,[2] Luj a offert de se lier et de s'entretenir de tems en tems: je crois que cette liaison ne seroit pas inutile à Mr. de Rochefort, il ne tient qu'à Luj de s'en prevaloir; Je suis ravi, Monsieur, de voir que vous avez si bien pris la maniere sincere et cordiale, avec laquelle je vous avois ouvert mes pensées. Soyez persuadé, que je ne vous avois parlé, que comme je souhaiterois, qu'on me parlat aussi, c'est à dire sans detour et sans deguisement, ce qui est, comme vous dites, le caractere le plus seur et le plus estimable de la veritable amitié: mon droit et ma pretention à l'analyse des infiniment petits est sans doute de notorieté publique, mais c'est là justement la raison, par laquelle il me paroissoit qu'il ne falloit pas l'attribuer à un autre dans le tems que quelques envieux anglois font tous leurs efforts pour m'en disputer la gloire, de peur qu'ils[3] ne se servissent des armes que vôtre commentaire leur fournit; sans cela je me mettrois fort peu en peine de ce que chacun en croit en son particulier, pourvû que là dessus on ne m'insultat point publiquement. Vous dites, Monsieur, que vous ferez mettre un extrait de vôtre ouvrage dans la Bibliotheque germanique, où vous eclairerez le public sur de certains faits;[4] ce seroit asseurement le moyen d'empecher les Mathematiciens Anglois, qu'ils ne profitassent contre moy des argumens que vôtre ouvrage Leur pouroit suggerer; cette Bibliotheque germanique ne parvient pas jusqu'ici, ainsi je n'aurai pas le plaisir de voir vôtre extrait, à moins que vous ne trouviez bon de me le communiquer separement. Mr. de Rochefort m'a conté diverses particularités touchant la 2.de edition que vous preparez de votre Traité du beau,[5] ce qui a excité ma curiosité de la lire aussi quand elle sera publiée: ce sera tres bien fait de vous etendre amplement sur la beauté des mathematiques et sur celle de la physique, car la matiere est riche; la physique des Anglois est indubitablement bien sujet à la critique, cependant ils la crojent aussi infaillible que l'evangile. Pour ce qui est en particulier de la gravitation Newtonienne, il est certain que les Newtoniens vont plus loin que leur maitre Luj meme, car Mr. Newton ne regarde pas la pesanteur, comme une proprieté essentielle aux corps et quand il suppose que les corps s'attirent mutuellement comme par exemple que les planetes sont attirées, par le soleil et les corps terrestres par la terre, il n'entend autre chose par le mot de l'attraction que la force quelle qu'elle soit, qui fait que ces corps tendent à s'approcher ou à s'unir l'un à l'autre, en sorte qu'il laisse indecis si cela se fait par une pulsion ou par une attraction ainsi proprement dite. Mr. Coste, qui a traduit en françois l'optique de Mr. Newton[6] remarque fort bien dans sa preface, que chez Mr. Newton ce principe de l'attraction n'est rien moins que ce qu'on nomme qualité occulte dans les ecoles: et qu'il en est de l'attraction prise dans le sens de Mr. Newton comme de l'elasticité de l'air, dont en examine les effets, sans en connoitre ou rechercher la cause.[7] Il le dit en termes expres au commencement de la question 31 qui est à la fin de son traité d'optique. "Je n'examine point (dit il) quelle peut etre la cause de ces Attractions. Ce que j'appelle ici attraction peut etre produit par impulsion, ou par d'autres moyens, qui me sont inconnus. Je n'employe ici ce mot que pour signifier en general une force quelconque par laquelle les corps tendent reciproquement les uns vers les autres, quelle qu'en soit la cause."[8]
Vers la fin de la meme question il s'explique encore clairement en disant "je ne considere pas ces Principes comme des qualités occultes, qui soient supposées resulter de la forme specifique des choses, mais comme des loix generales de la Nature par lesquelles les choses memes sont formées; La verité de ces loix se montrant à nous par les phenomenes, quoiqu'on n'en ait pas encore decouvert les causes; car ces qualités sont manifestes, et il n'y a que leurs causes, qui soient occultes. Les Aristoteliciens n'ont pas donné le nom de qualités occultes, à des qualités manifestes, mais à des qualités, qu'ils supposoient cachées dans les corps et etre causes inconnues d'effets manifestes etc."[9] Et j'avoue que les Sectateurs de M. Newton n'ont pas la meme moderation que leur maitre; car ils sont assez hardis pour avancer sans deguisement que dans la nature il y a des attractions prises dans la signification ordinaire sans se mettre en peine si on peut concevoir ou non une attraction sans impulsion. Mais pour Mr. Newton lui meme, il ne vous accorderoit pas, que selon son sentiment la gravitation n'est autre chose qu'un effet immediat de la volonté continuelle de Dieu; Il vous diroit que la gravitation est plutot l'effet d'une loix generale etablie comme les autres loix du mouvement dans la creation de l'univers, en vertu de laquelle loix les planetes observent presentement dans leur cours cette admirable regularité tant par rapport à la figure de leurs orbites que par rapport à leurs tems periodiques, regularité generalement et constamment observée par les Satellites aussi bien que par les planetes; or c'est le seul principe de la gravitation proportionelle aux quarrés de leurs distances, qui explique tous ces phenomenes; Mais de dire, que Dieu trouve à propos de conduire les planetes dans les chemins qu'il leur fait faire precisement avec les vitesses que l'experience fait remarquer, il faudroit supposer en Dieu autant de volontés particulieres qu'il y a des planetes et des satellites dans le monde, ce qui seroit une hypothese bien plus composée, bien loin d'etre plus simple, comme vous pensés. Je suis du profond de mon coeur M. V. etc. Jean Bernoulli
Fussnoten
- ↑ [Text folgt]
- ↑ Daniel I Bernoulli
- ↑ Im Manuskript steht "il"
- ↑ [Text folgt]
- ↑ [Text folgt]
- ↑ Newton, Isaac: Traité d'optique... Traduit par. M. Coste, sur la seconde Edition Angloise, augmentée par l'Auteur, Seconde edition françoise, Paris 1722
- ↑ Coste, Pierre, Preface du traducteur, in: Newton, Traité d'optique, l. c., fol. e. iij verso
- ↑ Newton, Traité d'optique, l. c., p. 554
- ↑ Newton, Traité d'optique, l. c., pp. 587-588
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