Bernoulli, Johann I an Iselin, Jacob Christoph (1717.04.14)
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Autor | Bernoulli, Johann I, 1667-1748 |
Empfänger | Iselin, Jacob Christoph, 1681-1737 |
Ort | Basel |
Datum | 1717.04.14 |
Briefwechsel | Bernoulli, Johann I (1667-1748) |
Signatur | BS UB, Handschriften. SIGN: Archiv Bernoulli Ib, Johann (1667-1748) 6 |
Fussnote | Siegel |
Bâle ce 14. Avril 1717.
Monsieur et trés honoré Ami
Ne Vous fachez pas je Vous en prie de la promtitude avec la quelle je Vous importune peutetre par cette reponse sur Vôtre tres agreable derniere du 7 du courant,[1] que je reçûs hier au soir: L'affaire de mon fils,[2] qui me tient à coeur et le peu de temps que Vous avez à rester à Paris, semblent ne me point permettre d'aller lentement; je commencerai donc par cet article. Je Vous demande d'abord mille pardons [de][3] toutes les peines que cette affaire Vous donne; je suis honteux de v[oir q]ue je suis cause que Vous perdez une bonne partie de Vôtre temps qui vous est si precieux et que Vous sçavez employer ailleurs si utilement; mais puisque Vous avez tant de bonté pour moi que Vous prevenez meme mes solicitations et que Vous m'offrez Vos bons offices au delà de tout ce que j'aurois osé demander. Vous dites qu'aprez Vous étre informé en plusieurs endroits s'il y auroit moyen de placer quelque part mon fils, il n'y a ni Envoyé ni autre Seigneur etranger protestant chez qui on pût trouver quelque condition, parce qu'il n'y en a aucun qui ait femme et enfans; mais ne seroit il pas capable peutetre d'un autre emploi que de celui seulement d'enseigner de jeunes gens? ne croyez Vous pas que son habilité puisse s'etendre jusqu'à faire la fonction d'un sousecretaire ou d'une autre charge de cette nature d'autant plus qu'il possede assez bien plusieurs langues: S'il y avoit quelque bonne maison quoique catholique où mon fils ne seroit tenu qu'à enseigner la mathematique et la philosophie à des jeunes Gens de 15 à 16 ans, je prefererois une telle condition à une autre chez quelque Personne de la religion où on le voudroit astreindre de faire le pedagogue jusqu'à enseigner les enfans dans les rudimens de la langue latine; car pour Vous dire nettement, mon cher Monsieur, ma pensée, j'apprehende que ma reputation que Vous sçavez n'étre pas mal etablie à Paris ne vienne à souffrir, quand je permettrai que mon fils s'employe à des bassesses, ailleurs où je serois moins connu je ne serois peutetre pas si scrupuleux sur le chapitre de reputation; c'est là la raison pourquoi je n'ai jamais prié Mr. Varignon ni d'autres Amis étrangers de chercher à mon fils la subsistence, de peur que cela ne fit quelque mauvaise impression sur l'esprit de ces Messieurs, lesquels reglent ordinairement leur idée de nôtre condition et de nos facultés ou richesses sur celle de notre renomée, croyant par je ne sçai quel prejugé qu'on ne peut étre sçavant (car au moins je leur parois l'etre dans la science que je professe) sans etre aussi puissant et riche. Je ne manquerai pas de m'acquiter de la commission que Vous me donnez de faire Vos remercimens à Messieurs du Senat academique au sujet de la prolongation que Vous Leur aviez demandée et obtenue du terme prescrit à Vôtre absence. Tout le monde est impatient de Vous revoir, quelques uns ne le sont que par curiosité; mais pour moi, Vous sçavez quelle passion me domine, que c'est le desir ardent de Vous posseder, de jouir de Vous et de Vôtre presence, qui me fait souhaiter Vôtre promt retour; je suis veritablement impatient, et cette impatience me desole de pl[us] en plus; il n'y [a ri]en dans cette passion que de fort naturel, car la di[sette] où je suis d'Am[is ve]ritables et sinceres, me rappelle à tout moment le souvenir de la pureté de Vôtre amitié qui se faisoit connoitre dans Vos agreables conversations, dont je sens par consequent la privation d'autant plus vivement. J'ai un extreme plaisir de la consolation que Vous me donnez en m'offrant d'embrasser avec chaleur, quand Vous serez de retour et notre Recteur, mon interest à l'occasion de ma seconde Vocation de Groningue; je Vous assure que j'ai grandement besoin de votre aide; car tout ce que l'on a fait jusqu'ici n'a abouti à rien, on a bien fait mine de vouloir tenter toute chose en ma faveur et pour me retenir ici, mais il semble que tout n'étoit que grimace et singerie pour me duper et pour me faire donner dans le panneau, et que le veritable dessein de plusieurs étoit de me prostituer afin que quand je m'en chagrinerois je ne pûsse autrement que prendre la resolution de decamper d'ici pour faire place à un autre, ma personne leur étant peutetre trop à charge ou plutot un sudes in oculis: Entre autres un que j'avois consulté le premier et qui m'offrit tout son credit et l'assistance de son Pere (Vous le connoissez bien) sans quoi je n'aurois jamais commencé de produire ma vocation, paroit qu'il n'a pas agi avec moi de bonne foi. Il est vrai que la regence pour montrer quelque bonne volonté pour moi a resolu d'acheter à ses depens les instrumens experimentaux que l'on fait à Leyden et de me les confier pour en faire les experiences de physique en qualité de Professeur philosophiae experimentalis;[4] mais c'est peu de chose qu'un Titulus sine vitulo et le revenu qui en vient est fort incertain, quelque douceur de fix qu'on me donneroit m'accommoderoit bien mieux, dans ce cas je ferois les experiences gratis. J'ai deja donné une reponse à Messrs. de Groningue, mais telle qui fait plus voir l'impossibilité où je me trouve d'accepter leur vocation que le desir que j'ai d'ailleurs de retourner chez Eux, toutefois je n'ai pas refusé entierement d'ecouter des propositions plus favorables en cas qu'il m'en voulussent faire d'autres que celles qu'ils m'ont faites; je verrai ce qu'on me repondra. Adieu mon tres cher Ami; Ma femme Vous baise les mains. Je suis avec mon zele ordinaire Monsieur Votre tres humble et tres obeissant serviteur J. Bernoulli.
P. S. Madame Vôtre Mere à qui j'ai fait sçavoir que je Vous ecrirai pour recevoir d'Elle quelque commission pour Vous si Elle m'en vouloit charger m'a fait prier de Vous saluer de sa part et de Vous demander si Vous avez reçû la Lettre que Mr. Imhoff de Waldenbourg Vous doit avoir ecrite il y a quelque temps. Mon Neveu le Professeur à Padoue a resolu de se faire passer Docteur en Droit dans son absence avec Mr. [R]aillard, il Vous sera bien obligé si Vous l'honorés d'un Epigra[mme] pour le jour de sa promotion;[5] mais je ne sçai pas en[core quan]d elle se celebrera, peutetre ne se fera-t-elle qu[e sous Vôtre] Rectorat, auquel cas Vous auriez du temps de re[ste. Comme] mon Fils qui se tient presentement à Padoue chez mon Neveu e[n partira b]ientot sur mon ordre que je Lui enverrai la semaine qui vient pour se rendre à droiture à Paris et que peutetre il n'aura pas l'honneur de Vous y trouver encore, Vous aurez la bonté d'indiquer à Mr. Varignon, à qui je Vous prie de faire mes complimens, un endroit commode pour loger mon Fils d'abord aprez son arrivée et où en cas que Vous ne trouviez point de condition pour lui il puisse vivre à ses dépens mais de la maniere la plus menagere, car Vous sçavez que ma bourse n'est pas dans un état à lui permettre de faire grande figure surtout dans une Ville comme Paris où tout est excessivement cher; c'est pourquoi aussi je ne pourai pas le laisser longtemps à Paris à moins qu'il ne trouve le moyen de subsister par sa propre industrie et sans me causer des depenses, c'est encore par cette raison que je souhaiterois que s'il est obligé de quitter Paris faute de condition il trouvât une occasion de continuer son voyage soit en Angletere soit en Hollande dans la Suite d'un Envoyé ou d'un autre Seigneur, car je sçai qu'il se presente souvent de telles occasions et qu'il ne Vous sera pas trop difficile par les connoissances et le credit que Vous Vous étes aquis de l'y faire recevoir sur Vôtre recommendation; Je serois pourtant fort aise qu'il pût rester quelque temps à Paris, pour avoir l'avantage non seulement de cultiver mes connoissances que j'y ai et de profiter des conversations des Sçavans de Paris, mais aussi d'entendre les plaidoyers dans le Palais et meme dans le parlement s'il est permis d'y entrer, car je veux absolument qu'il s'exerce dans le droit et qu'il pousse cette étude selon tout son possible, afin qu'il se rende capable de disputer un jour avec applaudissement pour une chaire juridique, puisque selon toutes les apparences ce sera chez nous dans cette faculté qu'on aura la premiere vacance, et qu'il n'y aura pas si grand nombre de pretendans ni de si formidables, que mon fils ne puisse avoir aussi bonne esperance que qui que ce soit. Adieu encore une fois mon tres-cher Monsieur, excusez mon importunité.
A Monsieur
Monsieur Iselin, Docteur et
Professeur tres Celebre de l'Université
de Bâle
prsmt.
à
Paris
Fussnoten
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